Pays et villes
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BULGARIE |
Il s’avère que Mirbeau a été beaucoup plus présent en Bulgarie qu’on n’aurait pu l’imaginer et qu’il a même « marqué profondément la vie littéraire en Bulgarie pendant la période antérieure à la première guerre mondiale », selon l’historien bulgare Niko Nikov. Il semble qu’il y ait eu là conjonction de deux intérêts, au début du vingtième siècle : l’un pour l’engagement politique de l’intellectuel, particulièrement apprécié par les courants libertaire et tolstoïen — et ce n’est évidemment pas un hasard si ce sont des hommes de gauche, se rattachant à ces courants, qui ont traduit ses œuvres ; l’autre pour l’écrivain, romancier et dramaturge, qui semble le seul, ou l’un des rares, à être capable d’assure le dépassement du naturalisme et le renouvellement des genres littéraires, et ce, dans un cadre culturel général où la littérature française apparaît, à l’intelligentsia bulgare libérale et progressiste, comme un utile contrepoids à l’influence allemande et à la domination russe. Du bilan des traductions, il ressort que la grande époque a correspondu, en Bulgarie comme en Russie, aux années 1906-1912, et qu’en revanche la période communiste a été particulièrement réfractaire au génie du libertaire Mirbeau, qui a été de nouveau édité, mais sans excès, après la chute du régime. Comme d’habitude, ce sont ses deux romans les plus célèbres qui ont été le plus souvent traduits : Le Jardin des supplices (Градината на мъките) a paru à Sofia, en 1909, aux éditions Jivot, dans une traduction de Georgi Chopov, rééditée en 1918. Une autre traduction, dont l’auteur est inconnu, a paru chez Glouchkov, en 1911. En 1992 la traduction de Chopov a été republiée, à Tirnovo, chez Abagar. Enfin, quatre ans plus tard, est sortie, à Pleven aux éditions E.A, dans la collection « Slavata na Frantsia » [“la gloire de la France”], une nouvelle traduction, due à Teodor Valentinov Mihailov et de .Krasimir Vasiliev Mirtchev, sous un titre légèrement différent, Градината на мъченията [“jardin des souffrances”] (1996, 180 pages). Le Journal d’une femme de chambre , pour sa part, a été traduit sous deux titres différents : Гнило общество [“société pourrie”], aux éditions Moderna Biblioteka, en 1909 (460 pages), puis en 1921, aux éditions. Jivot, de Sofia (243 pages), dans une traduction d'Ivan Gantchev ; et Дневникът на една камериерка, traduction fidèle du titre français, d’abord en 1909, à la Biblioteka Prolet, collection « Liber Klub » ; puis en 1985, chez Profizdat, dans une traduction d'Isabelle Georgieva, avec une préface de Venko Christov (295 pages) ; et enfin deux fois en 1992 : à Sofia, aux éditions P. K. Iavorov, 1992 (196 pages), dans la traduction d'Isabelle Georgieva, reprise de l’édition de 1985, et à Varna, chez A. L., dans la collection « Papyrus », n° 9 (315 pages), dans la traduction d’Ivan Gantchev, reprise de l’édition de 1921. Par ailleurs, des adaptations théâtrales du roman ont été données à Sofia ces dernières années. Deux autres romans ont également eu droit à une traduction bulgare : Le Calvaire a paru d’abord en 1907, à Sofia, aux éditions de la revue Biblioteca, sous le titre Lobno miasto [“lieu d'exécution”], dans une traduction de P. Neïkov ; puis en 1909, à Sofia, aux éditions Jivot, sous un titre nouveau apparenté aux titres russe et allemand, Golgota, dans une traduction de Georgi Chopov, rééditée en 1918. En outre, le chapitre II sur la guerre a paru deux fois en brochure, en 1906 et en 1908. L’Abbé Jules (Abat Joul) a été publié en 1911 à Sofia, de nouveau aux éditions Jivot, et derechef dans une traduction de Georgi Chopov, qui semble bien avoir été le principal passeur de Mirbeau dans son pays. Un extrait, paru sous un titre signifiant “la fête de l’évêque”, a été publié dans une revue progressiste, en octobre 1907. De La 628-E8, seul a été traduit le sous-chapitre sur les pogroms antisémites dans la Russie tsariste : en 1910, dans une traduction de Bratoiev, rééditée en 1928 sous le titre d'Evreiski pogromi [“pogroms juifs”]. Pour ce qui est des contes, un recueil de 44 pages, intitulé Razkazi [“contes”], a été publié à Choumen en 1909, traduit par Ivan Georgiev. D’autres contes, dont cinq seulement ont été recensés, ont été publiés dans diverses revues entre 1906 et 1913, notamment « Porokt » [“le vice”], c’est-à-dire « Pour M. Lépine », et « Slouginia » (« La Bonne ». Une recension plus complète reste à faire.
Le théâtre n’est pas en reste, et quatre pièces de Mirbeau ont été traduites :
Les Mauvais bergers , traduit par G. P. Donev, sous le titre Лошите овчари [“les mauvais conducteurs”], a paru en 1921, à Sofia, aux éditions P. G. Blasnov, dans une collection du théâtre ouvrier, symptomatique de l’utilisation militante qui devait être faite de cette tragédie prolétarienne. L’Épidémie a connu deux traductions : en 1907, par Chrbanov, et en 1910 par Bratoiev, dont la traduction a été publiée à la fois dans la « Petite bibliothèque » (n° 5) et la « Nouvelle bibliothèque » (n° 11). Scrupules, dont le titre bulgare, Kрадецът, signifie “le voleur”, comme en allemand et en russe, a paru aussi en 1910, dans la « Petite bibliothèque », traduit également par Bratoiev Auparavant des représentations en ont été données au Théâtre du Peuple de Sofia à partir du 7 mai 1907. Quant aux Affaires sont les affaires, c’est T. C. Tontchev qui en a été le traducteur, dans une édition intitulée Интересите преди всичко [“l’intérêt avant tout”], parue en 1906 à Varna, aux éditions Ikonomov, dans la collection « Bibliothèque théâtrale ». La pièce a certainement été représentée, mais nous ignorons où et à quelle(s) date(s).
Ce qui est le plus stupéfiant, dans l’aventure bulgare de Mirbeau, c’est la publication, à Plovdiv, en 1922, d’un essai sur la prostitution, Любовта на продажната жена (Lioubovta na prodajnata jena) inconnu en français, et qui a tardivement paru en France en 1994, traduit du bulgare par Alexandre Lévy, sous le titre L’Amour de la femme vénale, traduction littérale du titre bulgare. Alexandre Lévy a ensuite fait paraître une nouvelle édition en bulgare, de nouveau à Plovdiv, mais dans une traduction nouvelle, à l’orthographe modernisée, qu’il a réalisée à partir de sa propre traduction française... Comment ce texte est-il arrivé en Bulgarie cinq ans après la mort de l’écrivain ? Nous l’ignorons encore. Mais il est plausible que la traduction bulgare ait été réalisée à partir d’une traduction russe, non retrouvée à ce jour, qui aurait pu paraître, vers 1912 ou 1913, dans une revue libertaire, hypothèse qui ne pourra malheureusement être vérifiée que lorsque toutes les revues russes de l’époque auront été dépouillées, ce qui n’est pas demain la veille. P. M.
Bibliographie : Alexandre Lévy, « Lioubovta na prostitutkite », Literaturen vestnik, Sofia, 26 septembre 1995 [en bulgare] ; Pierre Michel, préface de L’Amour de la femme vénale, Éditions Indigo-Côté Femmes, 1994, pp. 7-27 ; Niko Nikov, « Mirbeau en Bulgarie », in Actes du colloque Octave Mirbeau d’Angers, Presses de l’Université d’Angers, 1992, pp. 461-466.
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