Pays et villes
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AMSTERDAM |
Amsterdam est la capitale des Pays-Bas et la principale ville de Hollande, aujourd’hui peuplée de près de 800 000 habitants (environ 500 000 en 1900). Opulente ville de marchands, Amsterdam a connu son siècle d’or au dix-septième, quand le niveau de vie de ses habitants était très largement supérieur à celui des Parisiens ou des Londoniens. Elle est célèbre pour ses canaux, dont le réseau, constitué de cercles concentriques, forme une manière de toile d’araignée. Mirbeau est, semble-t-il, allé plusieurs fois à Amsterdam, notamment en avril 1905, au cours de son périple automobile à travers la Belgique, la Hollande et l’Allemagne. Il l’évoque au chapitre V de La 628-E8 (1907). Il éprouve une vive affection pour la ville de Rembrandt et de Vermeer, pour le charme de ses canaux, tous différents (« Chaque portion de canal est un paysage différent de murs, de pignons, de chalands, de fenêtres fleuries; chaque maison a son visage propre, sa structure individuelle, selon le degré d'affaissement des pilotis qui la soutiennent », et aussi pour ses musées, dont le plus célèbre est le Rijksmuseum : « Rembrandt n'est pas né dans un grand port, c'est vrai... Mais son nom est inséparable de celui d'Amsterdam, où il vécut tant d'années, et y trouva l'emploi de ses dons, en leur toute-puissance... Amsterdam, dont les habitants sont vêtus de noir, comme ceux de Venise, avec le même orgueil et un goût pareil des accents éclatants et des ornements lourds. Dans l'une et l'autre ville, le soleil fait la même féerie avec le ciel et avec l'eau qui divise les maisons, jusqu'à ce que l'humidité se condense en brouillard, pour lui dérober la cité aquatique et la restituer à l'obscurité, sur qui le triomphe de l'astre n'aura que plus de splendeur. » Néanmoins, anticipant La Nausée de Sartre, il est écœuré par la « puanteur » et la menaçante accumulation des immondices au fond des canaux, dont l'eau « est de plomb » : « Une sorte de graisse purulente, une sorte de mucus qu'elle a sécrété, mousse, tournoie, ondoie à sa surface. [...] Déjà, les miasmes traversent les boues et l'eau, envoient crever à la surface leurs bulles d'infection. Qu'on remue ce lit profond de pourritures, où le moindre caillou qui tombe délivre les fièvres captives, qu'on le drague, qu'on l'expose à l'air, et c'est la ville, c'est le pays entier, ce sont les pays voisins, c'est toute l'Europe empoisonnée... C'est la peste, le choléra, ce sont peut-être des fièvres inconnues, c'est la mort sur le monde ! [...] L'eau se venge d'avoir été domptée, immobilisée, écrasée entre des murs de pierre. Elle est faite pour courir, s'épandre et chanter sur les cailloux d'or. Chaque fois, qu'elle croupit quelque part, elle devient mortelle... On a beau faire, il y a toujours un moment où la nature secoue formidablement le joug de l'homme. » « En attendant – ajoute-t-il, non sans quelque ironie – Amsterdam s'épanouit au soleil du printemps. Les tons délicats de ses rues jouent avec les eaux noires des canaux, avec les ciels rares qui achèvent son délice. Ses habitants prospèrent; ils donnent l'exemple de l'activité et de l'emploi judicieux des richesses; ils demandent à une centaine de sectes religieuses de leur enseigner la voie qui conduit le plus sûrement à Dieu... Ils cultivent les tulipes, les narcisses, et les beaux lis de l'Extrême-Orient, taillent le diamant, spéculent sur les marchandises lointaines, entassent l'or, rêvent d'un plus immense polder, pour remplacer le Zuyderzee desséché... Et, minute à minute, les vases mortelles se déposent, se superposent les unes aux autres, s'accumulent... » P. M.
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