Pays et villes
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ANGERS |
Chef-lieu de département de Maine-et-Loire (82 398 habitants en 1906, 154 000 habitants en 2010). Angers est depuis la Révolution Française et tout au long du XIXe siècle, l’un des bastions de la République dans l’Ouest de la France, marqué par la résistance de la droite contre-révolutionnaire et la permanence d’un puissant catholicisme militant (voir André Siegfried, Tableau politique de la France de l’Ouest, 1913). La ville est également connue pour la qualité de sa vie culturelle et artistique qui lui vaut alors le surnom « d’Athènes de l’Ouest ». Surtout, Angers est l’un des hauts-lieux de la bataille du Foyer, en février 1909. Le 25 janvier 1909, devant l’agitation provoquée par les représentations du Foyer à Paris, Brest, Cannes et Nantes, le maire, Charles-Ambroise Monprofit (républicain modéré rallié aux conservateurs) demande à Charles Baret d’effectuer quelques coupures dans la pièce. Parmi les arguments invoqués, de possibles désordres liés à des manifestations des sections locales de l’Action Française. Charles Baret refuse. La presse angevine de droite et d’extrême droite (Le Petit Courrier, Le Journal de Maine-et-Loire et La Chronique Angevine) se déchaîne alors contre ce qu’elle considère comme « une immonde déjection littéraire ». Elle demande en outre l’annulation de la représentation, « une mesure de salubrité publique ». Le Patriote de l’Ouest (organe des radicaux) dénonce quant à lui « une grave atteinte à la liberté d’expression », faisant remarquer au passage que « plus les réactionnaires feront de bruit autour de la pièce, plus ils en assureront le succès ». Le 12 février, devant l’ampleur de la polémique et les risques sérieux de troubles de l’ordre public, Monprofit prend un arrêté interdisant la représentation du Foyer. Contre toute attente, l’administrateur général du Théâtre Municipal, Félix Camoin, brave la décision municipale et décide coûte que coûte de faire jouer la pièce. Le 16 février, jour de la représentation, un important service d’ordre (policiers municipaux, gendarmes à cheval, fantassins du 135e RI et soldats du 25e régiment de dragons) prend position place du Ralliement. Membres de l’Action Française et « Patriotards » (lecteurs du Patriote de l’Ouest, seul journal angevin soutenant Félix Camoin dans son combat) se font face. La préfecture estime à plusieurs milliers de personnes le nombre de manifestants et de simples curieux qui sont venus assister au dénouement de l’affaire. En fin d’après-midi, le maire d’Angers ordonne que soit coupée l’alimentation électrique du théâtre municipal afin d’empêcher la représentation. Au dernier moment, le préfet de Maine-et-Loire, Cruchon-Dupeyrat, sans doute sur ordre du Président du Conseil et ministre de l’Intérieur Georges Clemenceau, casse l’arrêté municipal d’interdiction et ordonne que la pièce soit jouée. La représentation se déroule devant un parterre d’invités, triés sur le volet par Félix Camoin, à la lumière de lampes à acétylène louées pour l’occasion. La déception du public est d’autant plus grande que la pièce n’est pas aussi sulfureuse que ne l’avait annoncé la presse. Peu de temps après la bataille du Foyer, Félix Camoin est congédié. Le maire, Charles-Ambroise Monprofit, porte l’affaire devant le Conseil d’État, mais est débouté. Baret, Mirbeau et Natanson retirent la plainte déposée contre la municipalité angevine pour « excès et détournement de pouvoirs ». Très largement relayée par les journaux nationaux, cette bataille du Foyer affaiblit durablement l’autorité du maire, qui sera battu par un radical aux élections de 1912. Angers est aujourd’hui le siège de la Société Octave Mirbeau. La Bibliothèque Universitaire d’Angers possède un important fonds documentaire sur l’œuvre d’Octave Mirbeau (catalogue). G. R.
Bibliographie : Geoffrey Ratouis, « La bataille du Foyer à Angers (février 1909), Cahiers Octave Mirbeau, n° 7, 2000, pp. 217-227.
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