Pays et villes

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TOULOUSE

Métropole universitaire et industrielle du sud-ouest, située sur les bords de la Garonne et surnommée « la ville rose », Toulouse est la quatrième commune de France, peuplée de 440 000 habitants (860 000 dans l’agglomération). Elle n’en comptait que 150 000 en 1900 et a connu une croissance démographique très rapide.

Au cours de l’affaire Dreyfus, Mirbeau s’est rendu à Toulouse, en compagnie de Francis de Pressensé, vice-président de la toute nouvelle Ligue des Droits de l’Homme, et du poète Pierre Quillard, pour y tenir un meeting dreyfusiste dans la salle du Pré Catelan, réservée à sa demande par le poète toulousain Marc Lafargue. Le 17 décembre 1898, il confie à Claude Monet que, « à Toulouse, la bataille sera chaude », parce que les nationalistes y sont en nombre et très motivés. De fait, explique Pierre Birnbaum, « des affiches menaçantes sont collées sur les murs de la ville, de couleur tricolore : placardées par la Ligue antisémitique, elles invitent la population à protester contre l’emprise des Juifs. On reproduit un violent article de La Libre parole contre Mirbeau. » Aussi la réunion se déroule-t-elle dans une ambiance extrêmement tendue : les orateurs sont physiquement menacés par les sbires nationalistes et antisémites du colonel Perrossier, protégés de fait par la flicaille, aux ordres du gouvernement de Charles Dupuy. Le 23 décembre, Le Télégramme de Toulouse précise : « Arrivés devant la porte du Pré Catelan, les révisionnistes sont protégés par la gendarmerie à cheval qui les entoure. C’est alors que se produit une manœuvre qui serait véritablement odieuse si elle était préméditée. Les gendarmes saisissent un à un tous les amis de Mrs. de Pressensé, Mirbeau et Quillard et les laissent sans défense aux mains des antisémites. »

Le soir même, Mirbeau, Pressensé et Quillard adressent une lettre ouverte au président du Conseil, Charles Dupuy, qui paraît le 24 décembre dans L’Aurore. Ils y font le récit de la houleuse soirée et mettent en cause le gouvernement, jugé complice des factieux : « Depuis quelque temps, les bandes antisémites vociféraient du dehors leurs hurlements ordinaires de “Vive l’armée ! Mort aux Juifs !”, et des pierres tombaient sur le toit de la salle. Vos amis n’étaient pas loin. Ils envahirent bientôt la salle, où l’on n’accède que par un couloir étroit et long qui donne sur les allées Lafayette et qui débouche dans un jardin intérieur. Il eût été facile d’interdire l’accès du couloir à la meute des assassins. / Selon vos ordres, il en fut autrement : les assassins entrèrent, précédés d’une drapeau, et soufflant à pleine gueule dans un clairon national. Ils occupèrent, devant le commissaire de service et le commissaire central, les gradins du fond, qui avaient été laissés libres, toujours selon vos ordres, en vertu des seules combinaisons stratégiques où excellent les chefs actuels de l’armée et qui ont pour unique objet de massacrer sans péril de paisibles citoyens dans l’exercice de leur droit. / Au lieu de faire expulser les hordes – après avoir saisi ce prétexte pour dissoudre la réunion –, le commissaire de service les engageait du geste à faire l’assaut de la tribune. Mais la lâcheté naturelle des défenseurs de l’armée est telle que nous trois, résolus à continuer la réunion et à parler, nous avons pu traverser seuls les cinquante mètres de l’hémicycle et aller affronter les bêtes féroces qui se déclaraient disposées, non à discuter, mais à nous supprimer. […] Les gendarmes se ruèrent sur nous avec une férocité particulière, nous précipitèrent de la tribune, haute d’un mètre vingt, séparant Octave Mirbeau, arraché par le bras droit, de Pressensé, plus spécialement visé, et de Pierre Quillard qui put ne pas quitter le bras de Pressensé. Ce fut un écroulement dans les bancs et les chaises, on espérait nous briser bras et jambes ; et, tandis que, par fortune, Octave Mirbeau sortait, malgré les gendarmes, par une porte de derrière, Francis de Pressensé était jeté à travers la salle, de mains en mains, au milieu des projectiles, vers le jardin. Là les coups de canne portés par derrière brisèrent son lorgnon sur ses yeux, lui contusionnèrent le front, en même temps qu’ils lui enlevaient son chapeau pour mieux désigner sa tête presque blanche aux coups de vos assom­meurs. Même scène dans les couloirs. […] Pendant ce temps, Mirbeau, à qui vos mouchards avaient fait croire que F. de Pressensé et P. Quillard étaient arrêtés, allait chez le commissaire de police les réclamer ou demander à être arrêté comme eux. Il lui fut répondu avec la goujaterie de style. Puis, pendant que vos gens allaient boire ou se coucher, nos amis, redevenus maîtres de la rue, venaient, en foule compacte, acclamer sous les fenêtres de l’Hôtel Tivolier ceux à qui vous aviez si habilement fermé la bouche. Mirbeau, seul rentré alors, leur lança du haut du balcon le cri qui demeurera le nôtre de  “Vive la Révolution !” et ils se répandirent dans la ville en répétant ce cri que vous entendrez demain à Paris si vos provocations continuent. »

Pour ne pas rester sur l’échec d’un meeting avorté, les dreyfusistes de Toulouse – « la totalité des groupes avancés de la grande démocratie toulousaine », comme dit Francis de Pressensé – demandèrent aux trois compagnons de retourner à Toulouse pour y tenir un nouveau meeting, le 14 janvier 1899. Ils acceptèrent « sans hésitation », parce que, comme l’écrira Pressensé dans L’Aurore du 15 janvier 1899, il « valait la peine de braver l’outrage, la calomnie, la menace, les lâches coups portés par derrière, les coups de revolver eux-mêmes, pour empêcher le supplice d’un innocent, le martyre d’un héros, le déshonneur du pays ». Mais le projet ne se concrétisa pas, faute de salle disponible : en effet, les propriétaires des salles du Pré Catelan et du Tivoli, pourtant retenues successivement et dûment payées, prirent peur face aux menaces de représailles du colonel Perrossier, qui annonça dans Le Messager de Toulouse du 10 janvier que les « patriotes » s’apprêtaient à donner une nouvelle leçon aux « commis-voyageurs de la trahison et de l’anarchie », qui ne sauraient échapper « à la correction qui leur est due ».

P. M.

 

Bibliographie : Octave Mirbeau, « Le Guet-apens de Toulouse », L’Aurore, 24 décembre 1898.


TREVIERES

Trévières est une petite commune du Calvados, située dans le Bessin, région de bocages et de grandes exploitations, à 17 km de Bayeux. Elle est aujourd’hui peuplée d’un millier d’habitants, comme en 1900. Lorsque Mirbeau y est né, le 16 février 1848, la commune était administrée par Jacques Guilbert-Duclos, dont l’un des prédécesseurs n’était autre que Marc-Antoine Dubosq (1787-1841), notaire du bourg depuis 1818 et grand-père de l’écrivain, qui a été maire de 1826 à 1831. La mère d’Octave, Eugénie-Augustine Dubosq, fille de Marc-Antoine, est née à Trévières, en 1825, ainsi que sa sœur Marcienne, en 1831. C’est aussi à Trévières qu’elle a épousé Ladislas Mirbeau, « officier de santé » originaire de Rémalard, dans l’Orne, le 8 novembre 1843 : le marié apportait une dot de 6 000 francs et la mariée 3 500 francs, plus les droits sur la vente de l’étude paternelle. Les époux Mirbeau ont vécu six ans dans la maison Dubosq, qui remonte peut-être au XVIIe siècle et qui est toujours debout. C’est là que sont nés leurs deux premiers enfants : Marie en 1848 et Octave en 1848. Mais dès septembre 1849, Ladislas est retourné s’installer à Rémalard, et il n’est pas sûr qu’Octave soit jamais retourné sur les lieux de sa naissance. Toujours est-il qu’il n’en parle nulle part, faute d’en avoir gardé aucun souvenir. Le 11 septembre 1932, à l’initiative de la première et éphémère Société des amis de Mirbeau, et grâce à la générosité de Sacha Guitry, a été posée, sur sa maison natale, une plaque, toujours visible, en hommage au grand écrivain. La cérémonie a donné lieu à plusieurs comptes rendus dans la presse nationale et régionale.

P. M.

Bibliographie : Roger Jouet, « Octave Mirbeau et Trévières », in Colloque Octave Mirbeau, Éditions du Demi-Cercle, 1994, pp. 11-18.

TRIEL-SUR-SEINE

C’est à la fin de l’année 1909 qu’Octave Mirbeau s’installe avec son épouse à Triel-sur-Seine, petite commune de Seine-et-Oise (aujourd’hui des Yvelines), qui comptait à l’époque 3 000 habitants. (11 000 aujourd’hui). Située principalement sur la rive droite de la Seine, à 30 km à l’ouest de Paris, entre Poissy et Meulan, Triel est à quelques kilomètres de Médan où se trouve la célèbre demeure d’Émile Zola. Contemplé de la rive gauche de la Seine, le site offre une vue magnifique avec ses demeures bourgeoises en meulière, son église des XIIe et XVIe siècles de style gothique flamboyant et la verdoyante forêt de l’Hautil qui coiffe ce paysage ayant inspiré les peintres Dunoyer de Segonzac, Loiseau, Marquet… À l’ouest de la commune s’étend une vaste plaine qu’exploitaient, jusqu’à la fin des années 1970, des petits agriculteurs en cultures maraîchères et arboricoles très variées : poiriers, cerisiers, pruniers, abricotiers côtoyaient artichauts, petits pois, haricots verts… La plaine est limitrophe de Carrières-sous-Poissy où résida Mirbeau de 1893 à 1898.

C’est en fait au lieu-dit de Cheverchemont, sur les hauteurs de Triel, à mi-chemin entre Triel-Bourg et le hameau de l’Hautil, que Mirbeau fit construire une jolie villa au milieu d’un parc planté de peupliers. On peut penser que Mirbeau avait été inspiré par Zola pour le choix de ce lieu, car, à 300 mètres de sa demeure, se situe la villa « Les Framboisiers » que Zola avait louée de 1892 à 1895 pour y loger sa maîtresse Jeanne Rozerot et leurs enfants.

L’écrivain franco-égyptien Albert Adès (1893-1921), ami fidèle et intime d’Octave Mirbeau et lui-même Triellois, avait écrit dans un article intitulé « La dernière physionomie d’Octave Mirbeau »

 publié dans « La Grande Revue » de mars 1917 : « La maison qu’il s’était fait construire à Cheverchemont révélait bien sa recherche de lumière. Au milieu d’un jardin plein de roses et bordé de peupliers, c’est la maison la plus claire du pays.

            — Regardez comme c’est beau, disait le Maître en indiquant de la main la vallée et les iles de la Seine, Triel et son église, le cimetière dont on découvrait les tombes, au loin Vernouillet et les quatre rangées de collines vertes, dont les dernières s’effaçaient dans le bleu du ciel. […]

Lorsqu’il commençait à faire frais, nous entrions dans la maison. Elle était une émanation de lui-même. Tout y avait été choisi minutieusement et minutieusement contrôlé dans la suite. Ce qui ne lui plaisait plus était mis au grenier. Il préférait un mur vide au mur orné d’une œuvre dont il ne tirait plus une jouissance d’art particulière.

Le sentiment était étrange qui vous saisissait à voir toutes ces toiles : les Cézanne, les Monet, les Van Gogh, les Pissarro, les Renoir, les Marquet, et ces sculptures : les Rodin, les Maillol – parmi les meubles de ces chambres claires-immobiles dans leur sérénité d’immortels chefs-d’œuvres, reconnus comme tels par toute une génération d’hommes. Car on savait que ces merveilles étaient entrées dans la maison d’Octave Mirbeau, ignorées du public, méprisées de l’élite. […] Il avait donc la gloire, une maison claire, un jardin plein de roses, un potager plein de légumes, des murs et des meubles couverts d’objets qu’il admirait.  »

Durant ses dernières années à Triel, les ennuis de santé de Mirbeau se sont aggravés et il dut faire appel à la collaboration de Léon Werth, qu’il hébergea dans sa propriété de Cheverchemont en juin et juillet 1912, pour achever Dingo.

A sa mort, Alice Mirbeau fit don posthume de la propriété de Cheverchemont à la Société des Gens de lettres pour y fonder une maison de repos réservée aux écrivains peu fortunés. Sur des photos de l’époque, on peut d’ailleurs lire sur le portail de la propriété « Fondation Mirbeau ». Mais la Société des Gens de Lettres n’a pas tenu sa parole et la demeure de Cheverchemont a été revendue en 1941 à un approvisionneur triellois dont les héritiers en sont encore aujourd’hui les propriétaires.

Durant la dernière guerre mondiale, la maison fut occupée par les SS et, dans les années 70-80, elle fut louée par la famille de l’ingénieur général Pierre Soufflet, qui est à l’origine du lancement du premier satellite français par la fusée Diamant, l’ancêtre d’Ariane.

À Triel-sur-Seine une rue porte le nom d’Octave Mirbeau … N’essayez pas de l’emprunter en automobile par son accès rue de l’Hautil, car elle commence par un escalier escarpé d’une centaine de mètres, se poursuit en chemin, puis se transforme en allée très pentue, pour déboucher sur une étroite voie où l’on peut distinguer, au n° 21, à travers la végétation dense et sauvage, la propriété Mirbeau. La rue Octave Mirbeau traverse ensuite la rue du Général Leclerc, pour se poursuivre en chemin grossièrement goudronné et déboucher sur un chemin forestier qui s’enfonce dans les bois de l’Hautil.

À noter également que, depuis 1996, l’ancien gymnase de Triel transformé en un charmant petit théâtre de 160 places, a été baptisé Théâtre Octave Mirbeau.

P. P.

           

 

 

           

 


TURQUIE

Si modeste qu’elle ait été, la présence de Mirbeau en Turquie est loin d’avoir été nulle. Comme c’est souvent le cas, ce sont les trois œuvres les plus célèbres qui ont été traduites, et deux d’entre elles sont encore dans le commerce.

Le Jardin des supplices l’a été deux fois : en 1955, sous le titre Skenceler Bahçesi, Istamboul, chez Yeni Matbaa (152 pages), dans une traduction de Refii Cevad Ulunay, qui signe également une très brève introduction de douze lignes ; et en 2007, sous un titre nouveau,  İşkence Bahçesi, à Istanbul, chez Ayrinti Yayinlan et Yeralti Edebiyati Dizisi (255 pages), dans une nouvelle traduction due à Yildiz Ademoglu Atlan.  

Le Journal d’une femme de chambre  a eu droit à trois éditions. La première, Bir hizmetçi kýzýn hatýralarý  (382 pages), ornée d’une couverture supposée aguichante, a paru en 1948 à Istanbul, aux éditions Nebioðlu Yayýnevi, dans une traduction de Reþit Baran, et a été tirée à 3 000 exemplaires. La seconde édition, parue en 1963 chez le même éditeur stambouliote, reprend la traduction de Reþit Baran, mais comporte une très brève introduction biographique, signée Cevdet Perin. La troisième, intitulée Oda Hizmetçisinin Günlügü, a paru en 2004, également à Istanbul, aux éditions Ayrinti Yayinlari, dans une nouvelle traduction de Sevgi Terlemez (319 pages) ; elle comporte une brève présentation de l’auteur et une trentaine de notes explicatives.

Les affaires sont les affaires a été publié à Istamboul en 1932, sous le titre Is adami [“l’homme d’affaires”], chez Nasiri Ikbal Kütüpanesi sahibi Hüseyni (104 pages), dans une traduction de Güntekin Resat Nuri. Malencontreusement, sur la couverture, le nom de l’auteur est orthographié, en majuscules, OCTAVE MIRABEAU...

Pour ce qui est des autres œuvres, en l’absence de toute recension systématique dans la presse turque, nous ne pouvons en signaler que deux. Le Portefeuille a paru sous le titre İhtiyar Serseri [“le vieux clochard”], vers 1925, sans que nous sachions s’il s’agit de la farce ou du conte homonyme.  En 1939, a paru à Istanbul, chez Yeni Türk, une mystérieuse brochure de 24 pages, intitulée Kadın değil baş belası [“ce n'est pas une femme, c'est un problème”], dans une traduction de Kemal Emin. Nous n'avons pas identifié ce texte et ignorons s'il s'agit d'un conte – ou d'un recueil de quelques contes –, ou d'une farce en un acte, ou encore d'un autre texte encore inconnu en français.

Le seul texte critique que nous ayons trouvé est dû à Osman Çakmaci et a paru dans le journal Radikal, le 21 janvier 2005 : « Burjuva yaşamına 'sızmak' » [“la vie bourgeoise est ‘suintante’”]. Le travail de recension reste à effectuer. 

Mirbeau a peu parlé de la Turquie. Mais il a fait partie, avec Pierre Quillard et Anatole France, des intellectuels qui ont vivement dénoncé la sanglante dictature incarnée par le sultan Abdul Hamid, « la bête rouge », comme il l’appelle : il a accepté, en 1902, de préfacer Les Sultanades, poèmes de Handrey et Loris ; et il a stigmatisé les massacres des Arméniens et la complicité du ministre français des Affaires étrangères, Gabriel Hanotaux, à qui il fait dire, dans une interview imaginaire de L’Aurore, en pleine affaire Dreyfus : « Les Arméniens aussi étaient innocents [comme Dreyfus]… Et je les ai laissé massacrer par centaines de mille… »  (« Dans les ruines », L’Aurore, 26 mars 1899).  

P. M.

 

 


UKRAINE

Indépendante depuis 1991 seulement, l’Ukraine n’en dispose pas moins d’une langue, d’une culture et d’une histoire qui lui sont propres et a connu des courants nationalistes et indépendantistes durables. Mais le rattachement à la Russie tsariste, puis à l’U.R.S.S., n’en a pas moins entraîné, au cours des deux derniers siècles, une inévitable russification et l’usage très général de deux langues – et même de trois, si on ajoute le polonais, parlé à Lvov. Le résultat, en ce qui concerne Mirbeau, c’est que l’Ukraine lui a été doublement, voire triplement, accueillante : de même qu’en Russie stricto sensu, l’intelligentsia russophone a eu pour lui les yeux de Chimène, au début du vingtième siècle ; mais il en a été de même du courant progressiste proprement ukrainien, incarné notamment par le poète et régisseur de théâtre Mykola Voronyj (né en 1871), l’instituteur Boris Grintchenko (1863-1910), militant internationaliste du Parti radical-démocrate ukrainien, et Volodymyr Dorochenko (1879-1963), activiste socialiste du Parti révolutionnaire ukrainien. .

Les traductions ukrainiennes ne sont pas très nombreuses. Curieusement, un seul roman de Mirbeau a paru en ukrainien, et ce n’est pas le plus célèbre : Le Calvaire, publié en 1908 à Kiev, aux éditions Tchas, sous le titre bizarre de Brodiaga [“le vagabond”]. En revanche, les contes et, surtout, le théâtre ont été mieux servis. Un très petit recueil de contes (16 pages) a été publié en 1907, à Kiev, mais nous en ignorons le contenu. Il a été précédé en 1904 par « Vers le bonheur », Na stritchou chtchastia, traduit par  Volodymyr Dorochenko et paru, à Kiev également, dans Le Messager scientifique et littéraire, et été suivi, en 1924, par « Agronomie », également traduit par Dorochenko et paru à Lvov chez. Nakladom Tovaristva Prosvita, dans la collection. « Narodnia biblioteka » [“bibliothèque populaire”], n° 27, aux côtés de Crainquebille, d’Anatole France, dans une brochure intitulée Dvi doli, [“Deux destins”]. Les affaires sont les affaires, pour sa part, a été traduit par Boris Grintchenko sous le titre inattendu de Ou Zolotykh kajdanakh [“dans les chaînes dorées”] et a été publié à Kiev en 1907, par les éditions Malo-Jitomirska (122 pages). Les Mauvais bergers, Likhi pastoukhi a été publié en 1916, à Lvov, par les éditions Chliakh dans la collection « Novitnia Biblioteka »  n° 23 (106 pages), dans la traduction, fidèle, de Volodymyr Dorochenko, laquelle a été reprise en feuilleton, l’année suivante,  dans la revue Chliakh, et des représentations ont été données à partir du 5 janvier 1924 au théâtre national d’Ukraine, à Kiev, dans une mise en scène de Romanitskiï. Enfin, Scrupules a été traduit par Mykola Voronyj  et publié deux fois, à Kiev, sous le titre de  Zlodiï, signifiant “le voleur” : en 1918, aux éditions Dzvin, dans la collection « Universalna biblioteka », et en 1923, à Lvov, aux éditions Russalka, dans la collection. « Teatralna biblioteka ».  

Pendant la même période, sont publiées en Ukraine des traductions russes : en 1903, à Odessa, paraît une des nombreuses traductions pirates de Les affaires sont les affaires, Vlast dieniek [“le pouvoir de l'argent”], signée de A. P. Bourd-Voskhodov, mais sans indication d’éditeur ; en 1905, à Kharkov, c’est une brochure de 8 pages comportant « L’Enfant »,  Rebionok , traduit par L. Guendrikovaov, qui sort chez V. I. Potanov ; la même année, paraît à Jytomir, chez I. N. Kovarski, la traduction des Mauvais bergers par L. D. et V. S, sous le titre inhabituel de Plokhie vojaki (90 pages) ; en 1906, à Kiev, paraissent chez le même éditeur deux extraits du Journal d’une femme de chambre , traduits par Soloviev, Zapiski gornitchnoi [“les mémoires d’une femme de chambre”], et Iz dnievnika gornitchnoi [”extrait du journal d’une femme de chambre”] ; à Odessa, la même année et sous le même titre, d’autres extraits sont traduits par I. A. ; en 1926, à Kharkov, est publié, aux éditions Kosmos, Le Jardin des supplicesSad pytok  [“le jardin des tortures”], sans nom de traducteur ; en 1926, à Kharkov,  quatre sous-chapitres de La 628-E8, « Le Caoutchouc rouge », « Tapirs », « Missionnaires » et « Le Repas de funérailles », Krasniï kaoutchouk,  sont  édités par « Ukrainski rabotchiï » [“le travailleur ukrainien”], sous le titre de Krasniï kaoutchouk [“le caoutchoucrouge”]. Il faudra attendre 1991 pour que paraisse à Kiev, aux éditions Radianskiï pismiennik, une traduction complète du Journal d’une femme de chambre, Dnievnik gornitchnoi.

Notons enfin qu’une version polonaise de Scrupules a été représentée à Lvov le 13 mai 1904, en même temps que la version ukrainienne, et que la traduction polonaise de L’Épidémie, Epidemia, y a également été représentée le 20 mai 1905.

Il est notable que la quasi-totalité de ces traductions en trois langues ont vu le jour du vivant de Mirbeau ou dans les années qui ont suivi immédiatement la révolution russe. Mais après l’arrivée au pouvoir de Staline, Mirbeau n’a plus eu droit de cité en Ukraine, jusqu’à l’effondrement de l’U.R.S.S. D’autre part, on constate que le théâtre occupe une place privilégiée dans cette recension, comme si les pièces de Mirbeau étaient utilisées, avant et au lendemain de la Révolution, à des fins d’agit-prop.

P. M.

 

Bibliographie : Jaroslava Josypyszyn, « Octave Mirbeau et l’Ukraine », Cahiers Octave Mirbeau, n° 9, 2001, pp. pp. 434-442.


VANNES

Octave Mirbeau a été pensionnaire au collège des jésuites de Vannes, Saint-François-Xavier, de 1859 à 1863, « quatre années d'enfer ». Sur cette période cruciale de sa vie d'adolescent, il a écrit en 1888-1889, un roman vengeur, Sébastien Roch, publié en 1890, en partie autobiographique. Observons au passage que Mirbeau, malgré ses critiques acerbes, n'a jamais dissuadé sa sœur Marie de mettre ses deux neveux, Pierre et Marc Huberson, dans le même pensionnat, dans les années mêmes où il écrivait Sébastien Roch ...

En 1859, le collège des jésuites de Vannes se trouve « dans tout l'éclat de sa renommée », comme le note Mirbeau dans le roman : « Outre les familles nobles de la Bretagne, de l'Anjou, de la Vendée, qui formaient le fond de son ordinaire clientèle, la célèbre institution recevait des élèves de toute la France bien-pensante. ». Ouvert en 1850 avec 200 élèves, le collège en compte 500 lors du passage de Mirbeau, dont une grande majorité de pensionnaires, chiffre considérable pour une ville d'alors 12 000 habitants. 

Le choix de Vannes par les jésuites ne doit rien au hasard. De 1577 à 1762, ils avaient déjà dirigé dans cette ville le collège Saint-Yves, qui connut une grande prospérité et d'où ils furent chassés en exécution d'un arrêt du Parlement de Paris du 6 août 1762, sous Louis XV, ordonnant la dispersion des 4 000 jésuites français. Mais, comme le dit le père Marsille, « chassés par la porte, ils reviennent  toujours par la fenêtre » : ils se sont accrochés à la Bretagne comme la bernique au rocher et, à la faveur de la loi Falloux, ils sont revenus à Vannes pour fonder un nouvel établissement : Saint-François-Xavier. « Aucun décor de paysage et d'humanité ne leur convenait mieux pour pétrir les cerveaux et les âmes » écrit Mirbeau dans Sébastien Roch. Mœurs du Moyen-Âge, respect des souvenirs de la chouannerie, fatalisme religieux, résistance au modernisme, « dans le taciturne Morbihan », tout livre « l'homme abruti de misères, de superstitions et de fièvres, à l'omnipotente et vorace consolation du prêtre ».

Pour un petit bourgeois du Perche, comme Ladislas Mirbeau, le père d'Octave, soucieux de promotion sociale, l'inscription de son fils au collège des jésuites de Vannes n'est-elle pas le meilleur tremplin pour faciliter la carrière du rejeton ? « Quand on a les jésuites dans sa main, on est sûr de faire son chemin », se vante le père de Sébastien Roch. 

L'établissement scolaire sert de cadre à la première partie du roman, récit bouleversant « du meurtre d'une âme d'enfant » par un jésuite brillant, le Père de Kern,  mais séducteur et violeur. La description des lieux est tout à fait juste et encore reconnaissable aujourd'hui : bâtiments, cloître, cours de récréation, Golfe du Morbihan, lieu de promenade à Penboc'h, pèlerinage à Sainte-Anne d'Auray... Depuis 2005, le service du Patrimoine de la Ville de Vannes, qui veut faire du port une vitrine de la ville, se sert de sa description par Mirbeau dans Sébastien Roch ! Et l'auteur de cette notice reconnaît dans la chapelle des internes du roman, »sombre, basse, étouffante », son ancienne salle d'étude, traversée parfois par des rats qui n'étaient pas tous de bibliothèque ...   

Mirbeau a quitté le collège en juin 1863, un mois avant la fin de l'année scolaire, dans des conditions jamais élucidées. Mauvaises notes, indiscipline ? A-t-il été, lui aussi, comme Sébastien Roch, victime d'un viol par son maître d'études, le Père du Lac, devenu en 1871 recteur de la prestigieuse école Sainte-Geneviève, future figure emblématique des jésuites de France, lorsqu'il organisera en 1880 la défense de son ordre contre les mesures d'expulsion (avant d'être très proche, plus tard, du haut état-major de l'armée impliqué dans l'affaire Dreyfus) ? Ou s'agit-il d'une transposition romanesque, dont Octave Mirbeau, « une étrange machine à transfigurer le réel », est passé maître, pour mieux attaquer les jésuites, qui en France, à la fin du XIXe siècle, groupe de pression toujours influent, ne brillaient pas par leur esprit moderniste et leur soutien à la fragile république ?  Aucune preuve décisive ne peut être apportée. Dans l'ambiance fermée d'un internat religieux de garçons, d'où s'exhale couramment une odeur d'homosexualité plus que de sainteté, l'enfant Mirbeau a pu développer une sensibilité et une nature bouillonnantes, que l'on retrouvera dans toute sa création littéraire. 

Vannes et son collège de jésuites, Saint-François-Xavier, auront marqué d'une empreinte profonde, voire d'une blessure indélébile, Octave Mirbeau, pour la plus grande gloire de ... la littérature.

J.-P. K. 

 


VENEUX

Veneux-Nadon, aujourd’hui rebaptisé Veneux-les-Sablons, est un charmant village de Seine-et-Marne, proche de Moret et de Fontainebleau, où Alfred Sisley a peint, en 1880, une toile intitulée Temps de neige à Veneux-Nadon. Aux alentours de 1900, on y comptait environ 1 200 habitants.

Mirbeau y a villégiaturé pendant l’été 1901 et les quatre premières semaines de l’automne, du début juillet au 22 octobre. Il y a reçu avec ferveur de nombreux amis : Auguste Rodin, Alfred Jarry, venu à bicyclette, Pierre Quillard, Jules Huret, Georges Bourdon, Thadée et Misia Natanson, et Catulle et Jane Mendès, à qui il a lu sa nouvelle comédie,  Les affaires sont les affaires. Mais ce séjour estival a été marqué aussi par bien des misères : très douloureuse crise d’appendicite à peine arrivé ; grave accident de voiture d’Alice, qui a été fort longue à se remettre et qui aurait pu y laisser la vie ; et enfin mort de son fidèle chien Dingo, qu’il a pleuré comme un ami fidèle et irremplaçable. C’est à la fin de son séjour à Veneux-Nadon que Mirbeau a reçu, des acteurs membres du comité de lecture de la Comédie-Française, le « Procès-verbal des comédiens », qui l’a informé du double jeu de l’administrateur de la Maison de Molière, Jules Claretie, lors de la réception des Affaires « à correction », le 24 mai précédent.

Au chapitre XII de Dingo (1913), Mirbeau évoquera ainsi sa maison de villégiature : « Le printemps venu, craignant qu’il [son chien Dingo] ne tombât malade, je louai une maison rustique, dans un joli village, ou plutôt à l’écart d’un joli village, Veneux-Nadon, près de Fontainebleau. Le jardin donnait sur la forêt, dont il était en quelque sorte le prolongement. Nulle clôture, nulle barrière ne l'en séparait... La solitude y était charmante. De longs, longs silences, et tout d'un coup, les voix du vent dans les arbres, des voix qui emplissaient les hautes voûtes, les vastes nefs de la forêt, comme des chants d'orgues qu'aurait animés le génie d'un Beethoven. »

P. M.

 


VENISE

Très célèbre et très ancienne ville italienne, située sur l’Adriatique et peuplée aujourd’hui de 270 000 habitants, dont 60 000 intra muros (elle en comptait 190 000 en 1900). Elle a été fondée au sixième siècle sur des îles situées au milieu d’une lagune et est traversée de canaux qui contribuent à son charme. Longtemps cité-état et république aristocratique au centre d’un empire maritime, Venise est riche d’un patrimoine prestigieux, lié à sa puissance commerciale de jadis. Mais, entrée en décadence au dix-huitième siècle, elle est, depuis plus d’un siècle, envahie en permanence par des hordes de touristes et, depuis quelques dernières années, menacée d’enlisement.

Dans La 628-E8 (1907), Mirbeau prétend n’avoir jamais mis les pieds à Venise, ce qui, sans être certain, est en effet plausible, tant son allergie à l’image de cette ville qui n’en est plus une est évidente : «  Moi, si je n'ai jamais été à Venise où, pourtant, j'aurais aimé rendre visite à Titien et au Tintoret, chez eux, j'en accuse toute une iconographie crapuleuse et une non moins crapuleuse bibliothèque musicale et poétique. Peut-être n'y avait-il qu'un moyen de me laver de ces propos, de toutes ces mélodies, et de tant de motifs pour journaux mondains, illustrés par M. Pierre Lafitteet Cie, c'était d'aller à Venise. Mais chaque fois que je suis arrivé à en prendre la résolution, j'ai eu tellement peur de ne rencontrer, sur la lagune, que des amants du répertoire de M. Donnay, ou des paysages de M. Ziem, ou des ritournelles de M. Gounod, que j'ai toujours préféré retourner, une fois de plus, sur le Dam [à Amsterdam] »...

En 1912, dans sa préface au catalogue des Venise de son ami Claude Monet, il ironise de nouveau sur le compte de la cité des doges : « Venise n’est pas une ville. Vivante ou morte, une ville nous émeut par les maisons, les hommes et l’atmosphère. Or, à Venise, tous les poètes savent bien qu’il n’y a pas de maisons, mais des palais. Il n’y a pas d’atmosphère, puisqu’un voile rose est posé sur Venise, comme une écharpe autour d’une danseuse. Il y a un rose Venise, comme il y a un vert Véronèse. Venise a chaviré sous le poids des imbéciles. Les littérateurs l’ont peinte et les peintres l’ont décrite. Il y eut peut-être jadis une ville qui s’appelait Venise, une ville avec des maisons réelles et diverses, maisons borgnes qui guettent, maisons honorables et plates, maisons riches où l’or, derrière les façades, circule comme le sang sous la peau. Mais Venise n’est plus qu’une carte postale en couleurs. Quant aux hommes et quant aux femmes, ils ont été noyés dans la lagune. Il ne reste plus que des gondoliers, des grandes dames et quelques lévriers. [...] Venise pourrait espérer la gloire triste d’être une ville morte. L’Europe en a fait une ville nuptiale, où la bourgeoisie se conjugue... » Aussi comprend-il que, pendant longtemps, Monet, son frère spirituel, n’ait pas non plus « voulu aller à Venise, cette ville qui n’était plus une ville, mais un décor ou un motif. Claude Monet n’osait pas. Il se sentait assez fort pour peindre les campagnes et les villes. Mais peindre Venise, c’était se mesurer à toute la bêtise humaine, qui collabora à l’image que nous avons de Venise. »

P. M.


VICHY

Vichy est une importante ville d’eaux située dans l’Allier. Lancée sous le Second Empire et réputée pour ses eaux minérales chargées en bicarbonate de sodium et en gaz carbonique, elle a connu ensuite un boom touristique qui ne s’est jamais démenti. Elle était peuplée d’environ 15 000 habitants au début du vingtième siècle (27 000 aujourd’hui).

À l’instar de son ami Jules Huret, qui y faisait régulièrement des cures, Mirbeau y a fait un séjour de trois semaines en juin 1906. Mais, à la différence de ses séjours à Luchon, en 1897, et à Contrexéville, en 1907 et 1908, ce n’est pas lui qui y a été envoyé en cure par ses médecins, mais Alice, qui souffrait alors de coliques hépatiques. L’esprit libre, il a donc pu y travailler d’arrache-pied, avec l’aide de Thadée Natanson, à la correction et au charcutage de la première mouture de sa comédie Le Foyer, qu’il souhaitait raccourcir de 54 minutes avant de la lire à Jules Claretie. Sa hantise était de retrouver à Vichy des confrères dramaturges à succès... Les Mirbeau seront de retour à Paris le 26 juin.

P. M.


YIDDISH

Le nombre de traductions d’œuvres de Mirbeau en yiddish n’est nullement négligeable, prouvant l’intérêt que les intellectuels progressistes juifs de l’Europe de l’est pouvaient y trouver. Il est étonnant de noter que seul le théâtre semble avoir eu droit de cité, comme s’il avait été pour eux un efficace outil d’agit-prop. Il est à noter également que ces traductions ont paru dans quatre pays différents, révélant l’éclatement de la communauté en même temps que le désir de continuer à l’alimenter en textes susceptibles d’éveiller la réflexion. Enfin, toutes ces traductions ont paru en un espace de temps extrêmement court, entre 1899 et 1920.

* Les Mauvais bergers a connu trois traductions dans trois pays différents : aux États-Unis,  Di Shlekhte pastukherr a été publié le 7 janvier 1899, dans une revue non identifiée et dans une traduction de Jacob Gordin ; en Lituanie, alors située dans la Russie tsariste, la traduction de Vilnahi, intitulée Jan i Madlena (i Shlechte Fihrer) a paru en 1906 à Vilnius, aux Éditions du Futur, Bikherfarlag Tzukunft (102 pages), en caractères hébraïques, et a bénéficié pour cela d’un visa de censure, daté du 16 mars 1906 ; en Pologne, enfin, également occupée par les Russes, c’est en 1908  que l’éditeur Ferlag Progres de Varsovie a publié Zshan un Madlene (fabrikant Hargand), qui a été créé le 7 mai 1908 dans un théâtre juif de Russie, et dont le texte est également en caractères hébraïques (il est possible que la traduction soit la même que la précédente).

* Les affaires sont les affaires a connu deux éditions en Angleterre, à Londres, sous le même titre, fidèle, Gescheft iz gescheft. La première en 1908 chez L. Friedman, dans une traduction d’Esther Frumkin (1873-1943), membre éminente du parti social-démocrate juif Bund, qui a peut-être été réalisée à partir de la traduction russe et qui a été imprimée sur les presses du journal du Bund, Arbeter fraynd (162 pages). La seconde a paru en 1909 chez Zusman, dans un volume qui comporte également deux œuvres d’Oscar Wilde, Salomé et De profundis, traduites par Entin.

* Le Portefeuille, Der Tayster, a été publié à Varsovie en 1919 par Farlag Yidish, dans une traduction de Zalmen Zylbercweig (32 pages). Le même éditeur l’a republié l’année suivante dans un recueil de dix pièces européennes en un acte, Di Eyropeishe bine zamlung fun di beste eynacters.

* Enfin une traduction de Scrupules par Paskalyum, intitulée Der Ganev [“le voleur”], a été publiée en 1908 à Varsovie, chez Di shṭrahl. Une troupe de Juifs polonais de Vilnius a joué la pièce entre les deux guerres, à une date qui n'a pu être précisée, et sans qu'on sache si c'est la traduction de 1908 qui a été utilisée.

Signalons encore que la préface de Mirbeau à La Société mourante et l’anarchie, de Jean Grave, Di obshtarbende gezelshaft un die anarchie, a paru à Londres en 1908, chez Arbayter Fraynd, traduit par Rudolf Rocker.

P. M.

 


ZAANDAM

Zaandam est une petite ville du nord de la Hollande, aujourd’hui peuplée de 70 000 habitants (17 000 en 1900). Elle est située sur la rivière Zaan, près du Canal de la Mer du Nord, pas très loin d’Amsterdam, dans une zone où grouillaient les moulins à vent. Son port servait à l’importation du bois et on en partait pour chasser la baleine. Mirbeau semble y être passé au printemps 1905, au cours de son périple en automobile à travers la Belgique, la Hollande et l’Allemagne.

En 1871, Claude Monet a séjourné à Zaandam, où il a réalisé quelque vingt-cinq toiles. D’après le récit, sujet à caution, qu’en a donné son thuriféraire Octave Mirbeau dans La 628-E8, dans un sous-chapitre intitulé « La découverte de Claude Monet », c’est là qu’il aurait  découvert, tout à fait fortuitement, des estampes japonaises servant de papier d’emballage à un épicier, ce qui aurait été, non seulement le « commencement d’une collection célèbre, mais surtout d’une telle évolution de la peinture française, à la fin du XIXe siècle, que l’anecdote garde, en plus de sa saveur propre, une véritable valeur historique » : « Et c’est à Zaandam que ce miracle se passait, Zaandam, avec son canal, ses navires à quai, débarquant des cargaisons de bois de Norvège, sa flottille serrée de barques, aux proues renflées comme des jonques, ses ruelles d’eau, ses cahutes roses, ses ateliers sonores, ses maisons vertes, Zaandam, le plus japonais de tous les décors de Hollande. »

P. M.

 

Bibliographie : Octave Mirbeau, La 628-E8, chapitre V, Fasquelle, 1907.

 


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