Oeuvres

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Terme
Correspondance avec Grave, Jean

Il s’agit d’un petit volume de 93 pages, paru en 1994 chez un très modeste éditeur parisien, les Éditions du Fourneau. Établie, annotée et préfacée par Pierre Michel, cette édition de la correspondance croisée entre le grand écrivain libertaire et le militant et théoricien anarchiste Jean Grave comporte 58 lettres — dont quelques lettres-fantômes –, mais n’est pas complète pour autant : il s’avère en effet que la police a saisi, chez Grave, quantité de papiers, perdus à tout jamais, et il semble que, à une certaine époque, le courrier de Mirbeau ait été lui aussi surveillé et que des lettres ne soient jamais parvenues à leur destinataire.

Elle n’en constitue pas moins un document précieux pour l'histoire de l'anarchisme intellectuel à l’ère des attentats. Elle permet en particulier de mieux appréhender les contradictions d'un écrivain anarchiste tel que Mirbeau, qui était déchiré entre des impératifs difficilement conciliables : celui de l'intellectuel engagé, soucieux de mener des batailles et de les remporter, et celui de l'artiste avant tout préoccupé par les moyens à mettre en œuvre pour exprimer la vérité du monde telle qu’il la perçoit, même si elle est politiquement inutile, voire contre-productive. D’où des relations ambiguës avec un militant tel que Jean Grave, qui ne voit dans la littérature qu’un outil au service d’une fin politique. Certes, Mirbeau lui a apporté à plusieurs reprises une aide décisive : il a fait reculer la Société des Gens de Lettres en 1894, il a préfacé son œuvre maîtresse en 1893, il a témoigné en sa faveur en 1894. Mais des divergences idéologiques ont fini par quelque peu fissurer le parfait accord qui régnait au début entre l'auteur de La Société mourante et son prestigieux préfacier. Ainsi Grave a-t-il été choqué par le décourageant pessimisme des Mauvais bergers en décembre 1897, et a-t-il jeté un regard désapprobateur sur les alliances passées, au cours de l’affaire Dreyfus, avec des politiciens ennemis de la veille, tels que Joseph Reinach.

P. M.

 

Bibliographie : Pierre Michel, « Octave Mirbeau et Jean Grave », préface de leur Correspondance, Éditions du Fourneau, 1994, pp. 7-14.


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