Oeuvres

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Terme
LES AMANTS

Les Amants est une  farce en un acte qui n'a jamais été publiée d'une façon autonome et que Mirbeau a recueillie, en 1904, dans ses Farces et moralités. Créée au Grand-Guignol le 25 mai 1901, elle résulte d’un dialogue triste paru dans la presse dix ans plus tôt (« Les Deux amants », L’Écho de Paris, 13 octobre 1890). La pièce a été reprise plusieurs fois, notamment en 1989, dans une mise en scène de Jean-Loup Rivière, et en 1999, à la Comédie-Française, avec Alain Pralon et Martine Chevalier.

Après une espèce de prologue, où Mirbeau utilise un procédé pré-brechtien de distanciation, en faisant intervenir un Récitant, dont les ridicules propos, ampoulés et conventionnels, créent un contraste avec la scène qui suit, arrivent tristement les deux heureux amants supposés s’aimer d’amour tendre. Au fil de l’inconsistant dialogue qui suit, ils se révèlent aussi stupides, aveugles, incompréhensifs et égoïstes l‘un que l’autre, et après une dispute provoquée par l’Amante, qui s’est persuadée que l’Amant ne l’aime plus, celui-ci finit par l’apaiser par de grotesques déclarations et des caresses de plus en plus appuyées : « Silence. Baisers ».   .       

Les Amants constitue une caricature, cocasse autant que cruelle, des risibles conventions du langage amoureux et de la mystificatrice littérature à l’eau de rose qui s’en nourrit ad usum populi et qui véhicule le dangereux mythe de l’amour. Car, par-delà les grotesques échanges des faux amoureux bêtifiants dont il se gausse et qui révèlent, ce faisant, l’inanité de cette fausse monnaie qu’est le langage, Mirbeau entend bien démystifier et tourner en dérision les illusions de l’amour et illustrer une nouvelle fois l’incommunicabilité entre les sexes, radicalement étrangers l’un à l’autre et murés chacun dans sa solitude. Autant de thèmes d’une étonnante modernité, qui témoignent de son impitoyable lucidité, dont le pessimisme est transcendé par le rire. Car il parvient, ce faisant, à nous faire rire de ce qui devrait  plutôt nous faire pleurer.

P. M.

 

Bibliographie : Georges Dupeyron, « Sur deux pièces d’Octave Mirbeau », Europe, juin 1967, pp. 189-191 ; Tomasz Kaczmarek, « Farces et moralités.d’Octave Mirbeau », Studia romanica posnaniensia, n° XXXII, Poznan, 2005, pp. 148-150 ; Pierre Michel, « Un chef-d’œuvre méconnu : Amants », numéro spécial Octave Mirbeau de L’Orne littéraire, Alençon, printemps 1992, pp. 61-68 ; Pierre Michel,  « Introduction » aux Amants, in Théâtre complet de Mirbeau, Eurédit, 2003, t. IV, pp. 97-100.

 

 


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