Pays et villes

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HAMBOURG

Hambourg, vieille cité hanséatique, est une très grande ville du nord de l’Allemagne, située près de l’embouchure de l’Elbe, à une centaine de kilomètres de la Mer du Nord. Elle esr peuplée aujourd’hui de 1 800 000 habitants (600 000 en 1900) et a connu une croissance très rapide au cours des deux derniers siècles. C’est le plus grand port d’Allemagne et le troisième d’Europe. C’est de là que partaient le plus grand nombre de bateaux croisant dans l’Atlantique et les mers nordiques, emportant des millions d’émigrés vers l’Amérique. Vers 1900, la Hamburg America Line était la première compagnie maritime dans le monde.

Nous ne savons exactement quand Mirbeau a eu l’occasion d’aller à Hambourg, mais il semble s’y être rendu à plusieurs reprises. C’est là qu’il a fait la connaissance d’Antoine-Feill (voir la notice) et du baron Alfred von Berger, directeur du Schauspielhaus, et qu’il a peut-être aussi rencontré l’armateur Albert Ballin, qui est, selon lui, « le plus grand homme de l’Allemagne ». En 1906, il conseille à Jules Huret, qui prépare un très gros volume de reportages sur l’Allemagne, de ne pas manquer la Bourse, « qui a un aspect très particulier », et surtout de visiter le port en s’y promenant « sur des remorqueurs qu’on mettra à votre disposition des journées entières ». L’année suivante, dans La 628-E8, il parlera de Hambourg comme d’un « monstre » unique au monde (« Il n’est qu’un Hambourg ») et exprimera sa fascination pour le port : « Nul port n’a sa couleur extraordinaire, sa variété, son étendue, son machinisme, ni ses puissantes avenues d’eau que bordent, jusqu’à l’infini, comme d’immenses arbres d’hiver, les navires. Aucun n’a ses venelles tortueuses, par où il se divise, se répand, en canaux innombrables, dans la ville, et longeant des parcs, des pelouses, des palais, des talus fleuris, va rejoindre la belle nappe tranquille de l’Alster. Aucun n’a ses recoins mouvants où l’Elbe, si difficile à discipliner, s’infiltre, s’étrangle et rugit de ne pouvoir conquérir toute la terre. Nulle part, ces colossales silhouettes imprévues, ces îles flottantes, ces jardins magiques suspendus dans la brume, ces énormes et interminables villes que sont les docks, et cette impressionnante falaise rouge que font tout à coup surgir, dans le brouillard, les hautes maisons de brique d’Altona. Nulle part, ces nuits fantastiques qu’éclaire toute une prodigieuse constellation d’astres signaux, de phares, de projecteurs, de feux électriques, multicolores, de hublots embrasés… J’y ai, sur un petit yacht très rapide de la Hambourg-America, voyagé tout un jour et tout un soir, et je n’en ai vu qu’une partie infime. Nul grand port anglais ne m’a donné, autant que Hambourg, la sensation écrasante, presque douloureuse, du formidable… »

P. M.


HOLLANDE

Mirbeau et la Hollande

S’il est souvent indigné par l’Angleterre et s’il a tendance à tourner la Belgique en dérision, en revanche Mirbeau a pour les Pays-Bas les yeux de Chimène. À l’en croire, il s’y serait rendu à maintes reprises, mais seules trois séjours sont effectivement attestés : à la fin des années 1870, en 1896, à l’occasion d’un séjour en Belgique, et au printemps 1905, au cours de son périple européen à bord de sa Charron 628-E8. L’image qu’il donne des Pays-Bas dans La 628-E8 (1907) est effectivement très positive. Il y exprime une sorte d’euphorie devant les calmes apparences de cette patrie d’élection, aux ciels splendides, aux villes propres et remarquablement entretenues et au peuple pacifique, travailleur, patient et courageux, tout à la fois artiste et négociant. L’omniprésence de l’eau (« Ce n’est que de l’eau ») et de ses reflets de ciel, la richesse florale de ce « continuel jardin » qu’est la Hollande et la richesse des musées d’art contribuent à renforcer son attachement au pays de Rembrandt, de Rubens et de Van Gogh, où l’on est en droit, selon lui, de « rêver le bonheur universel » et dont il subit avec délice les « influences sédatives » : « C’est délicieux. La douceur du sol uni, sa claire et profonde monotonie que rompent et diversifient, à l’infini, l’immense lumière du ciel et les reflets de l’eau confondus, l’absence de tout appareil guerrier, le spectacle d’une vie à la fois active et très calme, d’où tout effort douloureux semble être banni, l’énergie tranquille des visages, le silence des polders et des canaux, tout cela vous prend, vous subjugue, vous conquiert. » Non sans exagération, il prétend y avoir passé tout un mois, « un mois merveilleux, un mois enchanté » et être « encore tout ému de ses paysages de ciel et d’eau, de ses villes penchées, de ses musées ». Mais, comme le remarque Lola Bermúdez, Mirbeau tend à idéaliser quelque peu : il ne s’appesantit pas sur les conflits sociaux qui couvent, et il ne dit mot du colonialisme hollandais qui, certes moins sanglant que l’anglais et que le français, n’en est pas moins lui aussi un système inique de domination et d’exploitation.

En réalité, Mirbeau n’est pas dupe des apparences, il a simplement envie d’y croire pour contribuer à les transformer un jour en réalités : « En bons égoïstes, en sages privilégiés de la fortune, ne cherchez pas trop à briser cette surface riante qui recouvre, peut-être, comme partout, des haines farouches, bien des luttes fratricides, une fermentation sociale qui, à Amsterdam, à Rotterdam, principalement, s’échauffe et bout dans les bas-fonds de la misère et du travail. Contentez-vous, comme toujours, des apparences qui rassurent, et, comme toujours faites-en des réalités. Que vous importe, si elles mentent ?… Il sera toujours temps de vous réveiller de vos rêves d’autruches. »

 

Mirbeau en Hollande

            a) Traductions

Comme le néerlandais ne compte qu’un nombre relativement modeste de locuteurs, et comme les Hollandais pratiquent beaucoup les langues étrangères, le nombre de traductions ne manque pas de surprendre. Certes, les romans dits « autobiographiques » sont restés inaccessibles aux néerlandophones, de même que Dingo et les pièces de théâtre. Mais cinq autres romans ont été publiés aux Pays-Bas, ce qui n’est pas négligeable.

* Le Jardin des supplices a été traduit une première fois par J. Feitsma, pour le compte de G. Schoonderbeek, sous un titre fort étrange, O, Vrouw...  [“Oh ! la femme...”]. C’est seulement en 1967 que paraît, à Amsterdam,  chez De Arbeiderspers - A B C Boeken, la traduction de Martin Ros et Pieter Beek, intitulée fidèlement De Tuin der Folteringen, qui fait autorité. Martin Ros la republie à son compte en 1997, dans la « Martin Ros Bibliotheek », puis de nouveau en 2004. Plusieurs rééditions, toujours agrémentées d’une brève postface, donnent lieu à des couvertures différentes.

* Le Journal d’une femme de chambre a été connu aux Pays-Bas sous deux titres différents. Dès 1900, J. Bergé, de Rotterdam, fait paraître Het Dagboek van een kamenier, dans une traduction assez libre de R. Bott. En 1907, nouvelle traduction, anonyme, sous le titre qui restera : Het Dagboek van een kamermeisje. Il faut attendre 1966 pour que sorte, chez De Arbeiderspers, collection  Grote A B C Boeken, n° 36, la traduction de Martin Ros, qui aura dix-huit rééditions jusqu’en 1980. Elle sera reprise chez un nouvel éditeur, De Prom, en 1989. Signalons encore que, en 1992, Jo Roets et Greet Vissers ont tiré du roman une adaptation théâtrale destinée aux enfants, Het Kammermeisje [“la femme de chambre”], qui a été éditée à Amsterdam par l’International Theatre Bookshop et le Nederlands Theater Instituut.

* Les 21 jours d’un neurasthénique a été également traduit par Martin Ros et édité en 1974 par De Arbeiderspers, sous le titre de De badkuur van een zenuwlijder [“la cure thermale d'un neurasthénique”].

* Comme en Angleterre, La 628-E8 n’a été que partiellement traduit et a paru en 1990 à Harlem, chez H. J. W. Becht, sous le titre de Schetsen van een reis [“esquisses d'un voyage”], avec la même préface que dans l’édition anglaise, signée Richard Nathanson et traduite de l’anglais. Curieusement, la traduction néerlandaise n’a pas été faite d’après le texte français, mais d’après la traduction anglaise, et, comme en Angleterre, c'est le nom de Bonnard qui figure sur la couverture, comme s'il était l'auteur du texte…

* Les Mémoires de mon ami est paru chez Iris en 2003 sous le titre, fidèle, de De memoires van mijn vriend, dans une traduction de Dick Gevers et Bart Schellekens. Mais le texte n’est accessible, moyennant une légère rétribution, que sur le site Internet de Dick Gevers.

* En 2010, également chez Iris, le même Dick Gevers a publié en brochure une sienne traduction de La Grève des électeurs, De Kiezersstaking, dans la collection « Anarchistische Teksten, n° 17. Il a aussi rédigé la préface, « Het eerste anti-verkiezinmanifest » [“le premier manifeste anti-électoral”].

* Le théâtre n’a pas donné lieu à des traductions imprimées. Mais il est sûr cependant que des pièces de Mirbeau ont été données en néerlandais, en particulier Besigheid is besigheid : le travail de recension reste à faire. Il est à noter qu’en Hollande, à Zwolle, a paru en 1919 une édition en français des Affaires sont les affaires, accompagnée de notes explicatives, aux éditions W. E. J. Tjeenk Willink, dans un recueil de Comédies modernes.

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b) Études mirbelliennes

Bien que sensiblement moins développées qu’en Italie, Angleterre, Espagne ou Allemagne, les études mirbelliennes ne sont pas pour autant inexistantes aux Pays Bas. C’est surtout Leo Hoek, de la Vrije Universiteit d’Amsterdam, qui y attache son nom, pour avoir consacré six articles, en néerlandais et en français, à la critique d’art de Mirbeau. Mais il faut aussi citer les noms de Dick Gevers, auteur de deux études et également traducteur, et de Jan Brokken, auteur d’un article d’une quarantaine de pages paru en 1977 dans un journal de La Haye, De Haagse Post, et inséré en 2004 dans Zoals Frankrijk was [“comment était la France”].

P. M.

 

Bibliographie : Lola Bermúdez, « Espaces de bonheur dans le voyage mirbellien », Verbum Analecta, Budapest, volume 8, n° 2-3, décembre 2006, pp. 301-314 ; Lola Bermúdez,  « Les Pays-Bas dans La 628-E8 », in Actes du colloque de Strasbourg, L'Europe en automobile – Octave Mirbeau écrivain voyageur, Presses de l'Université de Strasbourg, 2009, pp. 87-96 ; Dick Gevers, « La Réception de Mirbeau en Hollande », Cahiers Octave Mirbeau, n° 3, 1996, pp. 134-137.

 

 


HONFLEUR

Honfleur, port situé sur l’estuaire de la Seine, est une petite ville normande, peuplée de 10 000 habitants en 1900, qui a inspiré Courbet,. Boudin et Monet. C’est la patrie d’Alphonse Allais, Henri de Régnier, Érik Satie et Lucie Delarue-Mardrus, qui ont tous connu Mirbeau.

            Mirbeau a villégiaturé deux mois à Honfleur, en juillet et août 1900, et y a fort apprécié la barbue et la vue sur la mer. Il avait loué une charmante villa, entourée de très grands arbres et dominant la mer, le Buttin, situé au Val Chouquet — où se trouve aujourd’hui un hôtel de luxe. Comme d’habitude, il y a reçu nombre d’amis, parmi lesquels Auguste Rodin, Romain Coolus, Alexandre et Olga Natanson. Malgré une invitation pressante, Jules Huret ne semble pas y être venu, étant en cure à Vichy, mais, à défaut de sa présence physique, il a réalisé par correspondance une interview de Mirbeau destinée au Matin, qui le l’a pas publiée. Il  y écrit sans vergogne, à propos de l’accueil réservé au Journal d’une femme de chambre : « Nous avons eu la bonne fortune de rencontre hier Octave Mirbeau à Honfleur, où il villégiature.  Nous l’avons mis aussitôt en face des effrois et des indignations que son livre soulève. Mirbeau, de bonne grâce, s’est prêté à l’interview. / En élégant complet de flanelle blanche, rayée de lignes bleues, bottines jaunes et chapeau de paille, il est assis dans un fauteuil d’osier qui borde sa villa, “le Buttin”. On voit sur la mer, à travers les branches des arbres, passer, comme il dit, les marines de M. de Lanessan [ministre de la Marine] » (La Petite République, 29 août 1900). 

P. M.


HONGRIE

« Jugements contraires » – tel pourrait être l’exergue des écrits qui, parus entre 1897 et 1982 dans les différents journaux, revues et ouvrages de l’époque, renseignent assez précisément sur la réception d’Octave Mirbeau en Hongrie. Celle-ci se prête aisément à une division en deux périodes de richesse inégale, chacune se refermant sur un silence. La première englobe les trois premières décennies du siècle, la seconde s’inscrit dans l’ère communiste et se fait remarquer principalement par deux dates : 1955 et 1957.

 

Les trois premières décennies

 

Il convient d’emblée d’attirer l’attention sur une dichotomie assez frappante : si les traductions d’ouvrages de Mirbeau, dès la fin du XIXe siècle, sont relativement nombreuses et si l’on a notamment la surprise d’y voir recueillis en volume, dès 1904, des contes parus dans Le Journal, ou Un homme sensible, rares sont les critiques littéraires qui se proposent d’examiner, de façon approfondie, l’œuvre mirbellienne. Toutefois, cette première période demeure riche en comptes rendus dont le plus grand nombre – mêlant louanges et blâmes – voit le jour du vivant de l’auteur.

Le premier écrit qui soit paru au sujet de Mirbeau, le 15 mai 1897 dans le quotidien Nemzet, est signé par Dezső Szomory, grand auteur hongrois de la première moitié du XXe siècle. Ce texte se présente comme le « feuilleton » du numéro en question. Or, le lecteur s’attend en vain à quelque compte rendu strictement littéraire : Szomory transmet une confession lyrique pleine de verve et de chaleur, une écriture fiévreuse, saccadée, jaillie du fond de son cœur. La principale caractéristique de cet ouvrage est la discontinuité : désireux d’offrir un panorama sur l’œuvre, Szomory n’hésite pas à arrêter sa plume pour dire son sentiment d’enthousiasme profond. Vingt-deux ans plus tard, l’image de Mirbeau – à la fois ironique et magnifiée – apparaît une fois de plus sous la plume de cet auteur, notamment dans Paris, roman (1929), qui compte aujourd’hui parmi les plus grands classiques de la prose hongroise.

Néanmoins, la majorité des écrits de la première période, parus dans les célèbres quotidiens de l’époque, se tournent vers le théâtre de Mirbeau : en effet, trois de ses pièces ont été représentées à Budapest, peu après les premières françaises (Les affaires sont les affaires, Le Foyer, Le Portefeuille).

La mise en scène des Affaires sont les affaires, le 21 novembre 1903 au Théâtre National de Budapest, remporte un succès assez grand : la traduction est de Ferenc Molnár, célèbre auteur dramatique de l’époque, dont l’œuvre la plus connue est sans doute Liliom, plus d’une fois représenté en France.

Le cas du Foyer a ceci d’intéressant que sa « présence » en Hongrie précède considérablement sa représentation : déjà le 12 août 1906 un article est consacré, dans le quotidien Budapesti Napló, aux vicissitudes que subit la pièce à la Comédie-Française. Deux ans plus tard, le scandale de la représentation française du Foyer sera longuement détaillé dans Pesti Napló, dont le critique tient Mirbeau pour l’un des meilleurs écrivains français. Aussi le Théâtre National n’hésite-t-il pas à mettre en scène la pièce : la première aura lieu le 19 mars 1909 et éveillera un vif enthousiasme.

Le Portefeuille occupe une place à part parmi les pièces mirbelliennes représentées pendant cette période, et ce pour plusieurs raisons. L’une d’entre elles s’explique par la première du Portefeuille réalisée, le 18 février 1906, par la Compagnie Thália, théâtre d’avant-garde du tournant du siècle. Le Portefeuille sera représenté encore, durant la courte vie de la Compagnie, cinq fois de suite, notamment en 1908, et sera repris plusieurs fois dans les années qui suivent. Il existe une deuxième raison qui assure au Portefeuille un statut privilégié en Hongrie : parmi les pièces de Mirbeau, son texte est le seul qui soit publié en hongrois et ce, plus d’une fois.

Si les pièces de Mirbeau – célébrées ou blâmées – éveillent un intérêt assez grand pendant les trois premières décennies du siècle, il n’en va pas de même pour ses romans, auxquels peu d’articles sont consacrés. La parution du Journal d’une femme de chambre ne semble trouver nul écho dans l’univers littéraire de l’époque, ce qui est en opposition avec le fait que sa première traduction remonte à 1901.

En revanche, le 1er mars 1917, paraît une étude qui mérite une attention toute particulière sous plusieurs égards. D’une part, nous avons affaire au seul article de longue haleine qui soit consacré à l’œuvre mirbellienne, d’autre part cette étude, publiée douze jours après la mort du romancier dans la célèbre revue Nyugat, apprécie enfin l’œuvre à sa juste valeur, tout en montrant ses limites. À l’opposé de la plupart des critiques qui traitent l’auteur du Journal d’une femme de chambre de pornographe, Zoltán Ambrus est prêt à y voir « une satire mordante », « fougueuse », « impudique », dont la liberté de langage, faisant fi des tabous de la société bourgeoise, ne fait que mieux ressortir « son indignation sincère » à l’égard de l’ordre établi.

 

L’ère communiste

 

À partir de la fin des années vingt, le silence semble envelopper Mirbeau en Hongrie, excepté quelques traductions de romans et de contes qui voient le jour durant la troisième décennie du siècle. Cet oubli fut long et le renouveau a été restreint. En effet, Mirbeau n’est véritablement présent que dans les années cinquante, et encore cette présence se réduit-elle à une seule œuvre : Le Portefeuille. Aux deux anciennes traductions s’ajoutent deux autres, signe évident de la vitalité de la pièce.

Pourquoi est-ce Le Portefeuille qui survit le mieux à l’oubli ? On peut se le demander à juste titre. Cette survie s’explique peut-être par le fait que la comédie, se proposant de démystifier la société bourgeoise et sa loi, se prête aisément à une interprétation « marxiste », en favorisant une prise de position anticapitaliste. Il suffit d’examiner à cet égard la traduction datée de 1955. À la place de « traduction », il est plus juste de dire « adaptation » qui – sans s’écarter radicalement de l’original, mais désireuse de se conformer au climat et aux exigences politiques de son époque – s’efforce de déplacer l’accent du côté « farce » de la pièce à son côté « moralité », intention sans doute bienvenue dans l’ère communiste. L’éternelle actualité du Portefeuille et la possibilité de son application sur n’importe quel système sont justifiées par sa quatrième traduction, née en 1957 de la plume de Dezső Mészöly, deux après l’adaptation d’István Szűcs. Cette fois, nous avons affaire à une traduction proprement dite, excellente, rendant enfin fidèlement tous les aspects de l’éclat du texte de Mirbeau.

Notons pour terminer que cette quatrième traduction ne sera mise en scène qu’une seule fois et grâce à la Radio Hongroise, où elle était diffusée le 17 novembre 1972, dans l’interprétation des meilleurs comiques du temps. La représentation du Portefeuille par la « Radiothéâtre » en 1972 semble boucler la boucle minuscule de la seconde période : un nouveau silence retombe sur Mirbeau, aujourd’hui quasi-oublié, même si une nouvelle traduction du Jardin des supplices (1990), et la récente traduction des Amants (2008) lui restituent une certaine gloire.

 G. T.

 

Bibliographie : Sándor Kálai, « Notes sur une adaptation-traduction hongroise du Jardin des supplices », Cahiers Octave Mirbeau, no 14, 2007, pp. 218-220 ; Gabriella Tegyey, « Octave Mirbeau en Hongrie – Remarques sur une étrange rencontre », Cahiers Octave Mirbeau, n° 5, 1998, pp. 110-127

Traductions :

Kinok Kertje, Budapest, Népszava Könyvkereskedés Kiadása, 1921, 246 pages (18 cm). Traduction de Győző Gergely et Dezső Schöner.

Kinok Kertje, Budapest, Népszava Könyvkereskedés Kiadása, 1924, 246 pages (17 cm). Traduction de Győző Gergely et Dezső Schöner.

Kinok Kertje, Budapest, Pán, 1990, 157 pages.

Egy szobaleány naplója, Budapest, éditions Sachs-Pollák, 1901, 305 pages (19 cm). Traduction de Horácz Podmaniczky.*

Egy szobalány naplója, Budapest, Új Magazin Könyvek Kiadása, imprimerie Törekvés, 1937, 159 pages. Traduction de Margit Pálföldi.

A tolvaj [“le voleur”], Budapest, éditions Singer, 1914, sans nom de traducteur.

Csak finoman [“tout doucement”], Budapest, éditions Népművelési Propaganda Iroda, collection « Négy Klasszikus Kiskomédia », 1969, pp. 45-53.

Az üzlet. Traduction par le grand auteur dramatique Ferenc Molnár.

A szeretők, site Internet de Scribd, 2008.

Bűn és más elbeszélések [“le péché et autres récits”], Budapest, Freund Frigyes kiadása, collection « Modern írók könyvtára » [“répertoire des écrivains modernes”], 1904, 86 pages.

A tűzhely [“le foyer”, ou “le fourneau”]. Représentations à Budapest à partir du 19 mars 1909, avec Emilia Márkus dans le rôle de la baronne Courtin. Traduction d’Imre Huszar, qui ne semble pas avoir été publiée.

Egy finom úr története [“l’histoire d’un monsieur distingué / sensible”], Vienne, éd. Julius Fischer-Verlag, 192 ?., 79 pages.


HYERES

Hyères est une ville du Var, proche de Toulon. Aujourd’hui peuplée de 55 000 habitants, elle n’en comptait que 14 000 dans les années 1880. Station balnéaire réputée pour son ensoleillement et pour ses palmiers, Hyères a été longtemps fréquenté, surtout l’hiver, par l’aristocratie européenne (même la reine Victoria y est venue) et les couches supérieures de la bourgeoisie. Stevenson y a passé deux ans et Paul Bourget y a fait des séjours réguliers.

Nous ignorons précisément quand Mirbeau a eu l’occasion de séjourner à Hyères, mais comme il est allé souvent sur la Côte d’Azur, il a eu maintes occasions d’y passer. Toujours est-il qu’il connaît visiblement bien la ville et que c’est à Hyères qu’il a situé l’action de son roman Dans la vieille rue, paru en avril 1885 sous le pseudonyme de Forsan. Certes, Hyères n’est pas plus nommé que ne le sera Luchon dans Les 21 jours d’un neurasthénique (1901), mais la ville et l’environnement sont parfaitement reconnaissables. Le romancier y distingue deux villes juxtaposées et y oppose la population locale et les gens dits “du monde”, qui se comportent odieusement, mais avec une parfaite bonne conscience. 

P. M.


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