Thèmes et interprétations

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HYPNOTISME

HYPNOTISME

 

            On sait que Mirbeau s’est beaucoup intéressé à l’Inde et que, outre ses Lettres de l’Inde signées Nirvana, il a consacré à l’antique civilisation indienne une douzaine d’articles au cours de a seule année 1885. Deux d’entre eux sont consacrés à l’hypnotisme et paraissent dans Le Gaulois le 23 et le 29 mars 1885, le premier signé de son nom, le second sous le pseudonyme d’Henry Lys.

. Mirbeau s’y étonne vivement de l’intérêt que l’on manifeste pour cette « science étrange », pourtant vieille de vingt siècles et que l’on redécouvre en Europe, grâce notamment à Charcot et aux séances consacrées aux hystériques à la Salpêtrière, alors qu’il s’agit d’une pratique quotidienne en Inde, pour « les ascètes du Véda et du Bouddha ». Il va jusqu’à affirmer qu’il est possible d’hypnotiser un sujet à distance, et qu’un « ascète hindou » de Calcutta peut fort bien hypnotiser quelqu’un se trouvant à Bombay, voire à Londres. Il prétend avoir été témoin de plusieurs expériences « qui confondent la raison humaine » et en comparaison desquelles les expériences de Charcot ne sont que « de plaisantes et insignifiantes farces ». Ainsi, un « chela » parisien, disciple de ces ascètes hindous, est censé avoir hypnotisé un ami de Mandalay, « à trente jours de France »... À en croire Mirbeau, il y aurait en Inde trois écoles qui, à distance, communiqueraient « hypnotiquement entre elles », comme le permettrait un téléphone sans fil.

Certes, comme dans ses Chroniques du Diable de la même année (voir « Le Siècle de  Charcot », 29 mai 1885),  il reconnaît  que « la suggestion hypnotique » peut se révéler « dangereuse » et que c’est sans doute à elle que l’on doit des actes communément attribués au fanatisme religieux. Mais, heureusement, elle n’est à la portée que de quelques hommes supérieurs, qui ont complètement renoncé « aux passions de la vie » et qui sont « plus près de la divinité que de l’homme », tels ces sages qu’il évoque au chapitre III des Lettres de l’Inde (Le Gaulois, 8 mars 1885) et qui sont arrivés à un tel point de détachement que leur cerveau peut  « s’éthériser en quelque sorte » et « franchir les immenses espaces du vide ». Mirbeau souhaite, « pour l’honneur de la littérature français, toujours si arriérée », qu’un « écrivain de talent » introduise dans un roman les phénomènes étranges de l’hypnotisme et en donne une « étude définitive et critique ».

Le débat récent sur l’hypnotisme est une occasion, pour Mirbeau, de prendre ses distances à l’égard d’une conception trop restrictive de la science occidentale qui, au nom de la raison, refuse de reconnaître des phénomènes que « nous ne comprenons point ». Il en profite aussi pour rabattre le caquet des Européens, dont la première civilisation, celle des Grecs, est bien postérieure aux civilisations orientales, et pour moucher une nouvelle fois les Français « ignorants et vantards ».   .

            Voir aussi les notices Hystérie et Chroniques du Diable.

P. M.

 

            Bibliographie : Octave Mirbeau, « De l’hypnotisme », Le Gaulois, 23 mars 1885 ; Octave Mirbeau, « Le Siècle de Charcot », L’Événement, 29 mai 1885 (Chroniques du Diable, Annales littéraires de l’université de Besançon, 1995, pp. 121-127).

 


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