Thèmes et interprétations

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Terme
AUTOMOBILE

Inventée à la veille du XXe siècle en même temps que le cinéma qui confère l’ubiquité et l’immortalité, l’automobile ouvre à l’individu la liberté de circuler loin et rapidement. Elle aura, à l’égal du septième art, bénéficié à plus de gens dans le monde entier tout au long du siècle dernier, qu'aucune autre des réalisations techniques dont ce siècle fut prodigue. Dans L’Aventure automobile,  J.-A.Grégoire évoque « le très brillant et rapide développement de la construction automobile entre 1900 et 1914, lorsque la France se trouvait au premier rang » : avec 2 000 voitures en 1900, 14 000 en 1905, 30 000 en 1910 puis 38 000 en 1913, dont une partie importante était exportée « l’industrie française étant, à l’époque, la première du monde ».  On comprend l’enthousiasme de Mirbeau, adepte du progrès technique, fortifié encore par sa rencontre avec Fernand Charron, prestigieux sportif angevin, champion cycliste, puis coureur automobile, victorieux dans nombre d’épreuves, dont la première et emblématique coupe Gordon Bennett de 1900, avant de devenir un  constructeur inspiré : « le génial Charron » auquel est dédié   le premier roman-automobile de la littérature, La 628-E8, numéro d’immatriculation de sa C.G.V.

Profondément attaché à son indépendance, Mirbeau ne pouvait qu’être passionné par ce nouvel  instrument de liberté après la bicyclette et la marche à pied. Longtemps cette liberté sera très coûteuse, d’autant plus que la conduite délicate et l’entretien permanent de ces véhicules très coûteux, lourds et fragiles, impose l’emploi à demeure d’un mécanicien, dont le statut social et le prestige le situent très au dessus des domestiques, ainsi que Mirbeau le note avec amusement. D’ailleurs la plupart des voitures sont découvertes et imposent indistinctement à tous leurs occupants le port de  gros manteaux et de lunettes étanches pour lutter contre les intempéries et la poussière. Avec les premières automobiles fermées et la fiabilité accrue des mécaniques, le mécanicien ne sera bientôt plus qu’un chauffeur au sein de la domesticité. Vêtu désormais d’un uniforme bien codifié il sera longtemps maintenu à un poste de conduite ouvert aux intempéries, alors que , avec « les progrès des pare-brise comme l’invention des essuie-glace permettraient de l’accueillir à l’intérieur avec les maîtres, au besoin protégés d’une fâcheuse promiscuité par une vitre de séparation et un tuyau acoustique.

Mais à l’aurore de l’automobile, Mirbeau a le premier célébré la liberté que procure la voiture quand les « chemins de fer, qui ont leurs voies prisonnières, toujours pareilles… ne traversent réellement pas les pays, ne vous mettent point en communication directe avec leurs habitants ». Plus encore, ainsi que l’indique Pierre Michel dans « De l’impressionnisme à l’expressionnisme », Mirbeau « introduit un élément fondamentalement nouveau dans la perception et la restitution du monde extérieur par l’artiste : la vitesse » « avec ses arbres qui galopent » et ce « continuel rebondissement sur soi-même » Ainsi l’écrivain, « comme ses amis peintres … ces chercheurs de neuf dont il a été l’apologiste et le promoteur », a trouvé « de nouvelles ressources à son art afin d’exprimer des sensations nouvelles procurées par un monde en pleine transformation. ». Logiquement Mirbeau fera d’ailleurs de la C.G.V le véritable héros de son roman-automobile La 628-E8 .

A. Ge.

 

Bibliographie : Franck Michel, « L’auto(asservissement) mobile – La bagnole, de l’autonomie à la dépendance »,  site Internet de Déroutes,  2008 ; Octave Mirbeau, La 628-E8, Fasquelle, 1907 ; Éléonore Reverzy et Guy Ducrey, éd., Voyage à travers l’Europe, autour de “La 628-E8” d’Octave Mirbeau, Actes du colloque de l’université Marc-Bloch de Strasbourg, 27-29 septembre 2007, Presses de l’Université de Strasbourg, février 2009.

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