Familles, amis et connaissances

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Terme
BANSARD, alfred

BANSARD DES BOIS, Alfred (1848–1920) est l’ami et le confident de Mirbeau pendant toute sa jeunesse. Originaire de Bellême, du côté paternel, mais né à Rémalard, il est le fils d’un contrôleur des contributions et le petit-fils d’un médecin de Rémalard, collègue de Ladislas Mirbeau. Après une modeste carrière dans les contributions directes, il se lance dans la politique et il est élu député – républicain – de Bellême en 1881, battant alors l’ancien patron de Mirbeau, Dugué de la Fauconnerie. Battu par son concurrent en 1885 et 1889, il sera de nouveau élu en 1893 et siègera, très discrètement, à la Chambre jusqu’à 1914 et, n 1905, votera contre la loi de Séparation. Il a été aussi longtemps maire de Bellême, où un boulevard porte son nom.

            Enfants et adolescents, Alfred et Octave se sont probablement rencontrés régulièrement à Rémalard, à l’occasion des vacances scolaires. Puis, pendant de nombreuses années, c’est à l’ami Alfred Bansard que le jeune Mirbeau s’est confié par lettres, puisque les études, d’abord, des carrières professionnelles différentes, ensuite, les ont éloignés géographiquement l’un de l’autre. Mais beaucoup plus que des confidences sur ses chastes amours ou sur l’ennui mortifère du cercueil notarial de Me Robbe, ou des récriminations contre l’étroitesse de la vie provinciale, les frustrations sexuelles qu’entraînent la promiscuité et l’apartheid social, ou encore les bondieuseries dignes de Charenton, ses missives apparaissent comme de véritables essais littéraires. Mirbeau s’entraîne et fait brillamment ses gammes. Tout ce qu’il observe, entend ou ressent lui sert de prétexte à des développements superbement enlevés, souvent spirituels et cocasses, destinés sans doute à faire rire ou sourire son correspondant, et peut-être aussi à l’impressionner, mais surtout à faire ses preuves de jeune maître de la phrase. Tout est transmué en littérature, et les poses romantiques adoptées parfois donnent l’impression de n’être qu’un jeu. Son humour, son ironie, son style étincelant font merveille et contrastent avantageusement avec le brouillon de quelques laborieuses réponses d’Alfred, qui a probablement essayé, sans y parvenir, de rivaliser d’esprit avec son ami. À l’extrême, on est en droit de se demander si Alfred lui-même n’est pas autre chose, pour le jeune Octave, Rastignac doublé d’une Emma Bovary, qu’un prétexte commode, qu’une utilité transparente, tels les confidents de tragédie, pour pouvoir jeter sur le papier les phrases qui bouillonnent en lui et ont besoin d’un lecteur capable d’en jouir.

La guerre de 1870 va les séparer définitivement et, hors une banale lettre de condoléances, mettre un terme à ces échanges épistolaires inégaux. Comme si cette amitié de jeunesse n’avait été que superficielle et occasionnelle. Comme si Mirbeau, lancé dans la vie parisienne et dans une ambitieuse carrière journalistique et littéraire, n’avait plus le moindre besoin de cet ancien compagnon égaré en politique.

            Les Lettres de Mirbeau à Alfred Bansard ont été publiées une première fois aux Éditions du Limon, en 1989, puis insérées en 2003 dans le premier volume de la Correspondance générale de Mirbeau, parue à l’Âge d’Homme. 

P. M.

Bibliographie : Alexandre Lévy, « Mirbeau épistolier : Lettres à Alfred Bansard des Bois », Cahiers Octave Mirbeau, n° 4, 1997, pp. 33-45 (sites Internet http://mirbeau.asso.fr/darticlesfrancais/Levy-bansard.pdf ; Pierre Michel, préface des Lettres à Alfred Bansard, Éditions du Limon, 1989, pp. 9-32 ; Pierre Michel, « Octave Mirbeau de Rémalard », Colloque Octave Mirbeau, Actes du colloque du Prieuré Saint-Michel de Crouttes, Éditions du Demi-Cercle, 1994, pp. 19-34.

 


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