Familles, amis et connaissances

Il y a 286 entrées dans ce glossaire.
Tout A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Z
Terme
BLANCHE, jacques-émile

BLANCHE, Jacques-Émile (1861-1942), peintre autodidacte français, fils du Dr Blanche, le célèbre aliéniste. Il a été encouragé à ses débuts par Manet et Degas. Auteur de quelques paysages et de L’Hôte (1892), il est surtout connu comme portraitiste mondain : il a notamment portraituré son père, Yvette Guilbert, Pierre Louÿs, Beardsley, André Gide et Marcel Proust. Romancier à ses heures, il publie Aymeris en 1922. Il a aussi fait paraître en 1928 un livre de souvenirs, Mes modèles.

Mirbeau n’avait guère d’accointances avec ce « vilain hongre », comme il le qualifiait dans une lettre à son confident Paul Hervieu, qui, de son côté, voyait en lui un « fripouillard ». Dans son  « Salon » de 1892, il esquinte la première des toiles qu’il expose : « De quelles fabriques anglaises viennent Les Arabesques de M. Jacques-Émile Blanche, ces trois jeunes filles qui, la main dans la main, en robe blanche derrière une montagne, et le soir, je suppose, vont courant à quelque inévitable et whistlérienne surprise ? » Mais c’est surtout L’Hôte qui suscite ses sarcasmes : « Si M. Béraud peint des Christs bien parisiens, M. Jacques-Émile Blanche peint, lui, des Christs bien japonais. Voici l’ordonnance de cette mystique imagination. Dans une salle à manger bourgeoise, le Christ, poitrinaire, en robe japonaise à ramages bleus, est assis devant la table servie. Il élève en l’air le bras, par qui le monde sera bientôt sauvé, et il parle. Quelques vieilles dames, des enfants, un Turc, regardent l’hôte divin, d’un air consterné. Dans un angle de la salle, un monsieur se navre, baigné d’ennui ; il a l’air de se dire : “Comme je voudrais bien m’en aller !” Derrière le Christ est un buffet, rempli d’argenterie, de vaisselles, de plats anciens et, sur la table, devant le Christ, une bouteille de chartreuse verdit la nappe. Je n’essaierai pas d’expliquer ce symbole. Des journaux amis et très chrétiens ont tenté de le faire, et cela n’a pas paru très clair. Ce que je puis dire, c’est que rien ne tient, et que, en termes de métier, “tout fiche le camp”, dans cette toile sensationnelle » (Le Figaro, 9 mai 1892).

Le jour même, Blanche écrit au critique une lettre émouvante, de nature à toucher celui qui va bientôt rédiger un roman précisément consacré à la tragédie de l’artiste, Dans le ciel : « Si j’écrivais un Salon, ma critique ressemblerait un peu à la vôtre, car nous avons tous les deux le goût des belles choses et l’horreur des médiocres ; j’aurais même pu dire de mon tableau ce que vous en dites [...]. Vous vous étonnez peut-être qu’un artiste intelligent continue à produire quand il sait que son œuvre est si inférieure à ce qu’il entrevoit ; pourtant, Monsieur, je suis convaincu que vous souffrez du même mal que moi. Il est abominablement triste, quand on est doué d’un esprit critique aigu, de peiner à faire des choses dont on est condamné à ne jamais être un peu satisfait ; néanmoins, on continue, parce que l’effort, au moment où il est donné, procure certaines illusions que vous devez connaître. » Nous ignorons si Mirbeau lui a répondu. Par la suite, il suggèrera que Blanche s’inspire trop visiblement de Gainsborough.

P. M.

 

Bibliographie : Pierre Michel, « Octave Mirbeau et Jacques-Émile Blanche », Cahiers Octave Mirbeau, n° 9, 2002, pp. 222-227.

 

 


Glossary 3.0 uses technologies including PHP and SQL