Familles, amis et connaissances

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Terme
GOURMONT, remy de

GOURMONT, Remy de (1858-1915), écrivain aux multiples facettes, à la fois poète, romancier, essayiste, conteur, philosophe et critique. D’origine normande, il grandit dans la Manche, fit de peu studieuses études de Droit à Caen et caressa bien vite l’ambition d’une carrière d’homme de lettres. À l’automne 1881, il intègre la Bibliothèque nationale de France à un poste subalterne au Service du Catalogue. Gourmont entame ses collaborations à divers journaux (Le Contemporain, La Vie Parisienne, Le Monde), tout en rédigeant plusieurs ouvrages pour enfants et autres prix scolaires entre 1882 et 1893 (Un volcan en éruption, Bertrand du Guesclin, Les Derniers Jours de Pompéi, Chez les Lapons…). Si Paul Valéry eut sa « nuit de Gênes », Gourmont eut en 1886 son « frisson esthétique » à la lecture de La Vogue qui lui révéla ce qui allait sceller son devenir d’écrivain par Sixtine (1890) et Le Livre des Masques (1896 et 1898) : le Symbolisme. Il ne restait plus à Gourmont qu’à trouver une tribune à la hauteur du héraut, le Mercure de France, qu’il contribua à créer aux côtés d’Alfred Vallette et Louis Denise notamment. Mais la publication en avril 1891 de son article « Le Joujou patriotisme » lui coûta sa place à la Bibliothèque nationale et lui valut une cabale orchestrée par le journaliste Henry Fouquier. Cette même année il est atteint d’un lupus tuberculeux qui le défigure, il mènera dès lors une vie recluse centrée sur écrire, lire, penser. Son œuvre de critique va s’affirmer au travers d’ouvrages majeurs tels Le Latin mystique (1892), l’Esthétique de la langue française (1899), La Culture des idées (1900), Le Chemin de velours (1902), puis les différents volumes d’Épilogues et de Promenades littéraires (sept tomes de 1904 à 1927), dont Cocteau dira plus tard que c’est « l’intelligence même ». Quelques recueils de poésies jalonnent son itinéraire de pensée, dont Les Saintes du paradis (1899), Oraisons mauvaises (1900) ; des contes : Le Pèlerin du silence (1896), D’un pays lointain (1898), Couleurs (1908) ; et plusieurs romans : Le Songe d’une femme (1899), Simone (1901), Une nuit au Luxembourg (1906), Un cœur virginal (1907) sans oublier son roman inédit anarchiste, Le Désarroi (2006). Parallèlement, Gourmont, qui mène une intense activité de revuiste au sein de la Revue des Idées, entre autres, constitue un ensemble de trois volumes de Promenades philosophiques (1905, 1908, 1909). À la fin de sa vie, il se lia avec André Rouveyre et Guillaume Apollinaire. Seul et malade, profondément affecté par la Guerre, comme en témoignent Pendant l’orage (1915), Dans la tourmente (1916), Pendant la guerre. Lettres pour l’Argentine (1917), il connut cependant l’euphorie de l’amour inespéré en la personne de Natalie Barney, l’Amazone. Il mourut d’une congestion cérébrale le 27 décembre 1915.

            C’est au cœur de la tourmente causée par le Joujou patriotisme que Gourmont et Mirbeau tissèrent des liens. L’impact désastreux de cet article fut tel que seul Mirbeau prit la défense du jeune Gourmont, dont il partage les points de vue : tous deux récusent le patriotisme belliciste, rejettent l’esprit revanchard à l’égard de l’Allemagne, espèrent une entente culturelle entre la France et l’Allemagne. Mirbeau en ardent défenseur de la liberté d’expression fera gaillardement face, avec Gourmont, aux violentes attaques qui s’ensuivirent, en tête desquelles celles d’Henry Fouquier, alias Nestor. Dans son article « Les Beautés du patriotisme » du 18 mai 1891 paru dans Le Figaro), Mirbeau dénonce les excès du patriotisme et loue les mérites de Gourmont et, implicitement, ceux de toute la jeune génération symboliste comme il l’avait déjà dit à Jules Huret. De cet incident naquit une profonde amitié entre les deux hommes, dont leur correspondance témoigne. Mirbeau lui sera d’un précieux secours pour qu’il parvienne à retrouver une situation dans les lettres. Passée la tourmente de l’article, la littérature occupe à nouveau leurs esprits et leurs échanges, Gourmont conclut désormais ses lettres par « Bien affectueusement à vous, mon cher Mirbeau ». Mirbeau ne figure pas dans le Livre des Masques, comme cela fut envisagé, mais Gourmont lui consacrera une longue étude, précise et soignée, dans le premier volume des Promenades littéraires, qui parut en 1904. Il y exprime la « générosité foncière » de « l’écrivain passionné », de « l’explorateur littéraire et social », du « philosophe qui contemple l’avenir en regardant le présent et qui ne craint, ni de dénoncer une iniquité, ni d’admirer le génie naissant d’un jeune homme, fût-il seul à sentir ainsi, à parler ainsi. » Malgré ces lignes élogieuses, leurs relations vont se distendre petit à petit. La reconnaissance de Gourmont cédant la place à une certaine ingratitude à l’égard de son protecteur, qui voit son roman Le Journal d’une femme de chambre lui conférer gloire, renommée, et suspicion dans l’œil de Gourmont.

V. G.

 

            Bibliographie : Olga Amarie, « “Mon amitié n’est pas d’occasion, elle est de toujours” (Remy de Gourmont à Octave Mirbeau) », Cahiers Octave Mirbeau, n° 13, 2006, pp. 214-226   ; Vincent Gogibu, « Une lettre de Gourmont à Mirbeau », Cahiers Octave Mirbeau, n° 14, 2007, pp. 214-217  ; Gérard Poulouin, « Dix-neuf lettres à Octave Mirbeau », Nouvelle Imprimerie Gourmontienne, n° 1, automne 2000 ; Gérard Poulouin, « Remy de Gourmont et Octave Mirbeau : de l'amitié à la rupture », Cahiers Octave Mirbeau, n°8, 2001, pp. 341-363.


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