Familles, amis et connaissances

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Terme
HERVIEU, paul

HERVIEU, Paul (1856-1915), a d’abord été, comme Mirbeau, secrétaire particulier d’un politicien, le comte de Choiseul-Praslin, puis a tâté de la diplomatie, avant de se consacrer au journalisme et à la littérature. Il a collaboré au Gaulois dès 1882, participé, aux côtés de Mirbeau, à l'aventure des Grimaces en 1883, sous le pseudonyme de Liris, puis fourni quantité de chroniques et de contes au Gil Blas, au Figaro, et enfin au Journal. Il a publié en 1882 Diogène le chien, en 1883 La Bêtise parisienne, et en 1885, chez Laurent, un recueil de contes, L'Alpe homicide. Romancier très hostile au naturalisme, il est l’auteur de L'Inconnu, où se ressent l’influence de Dostoïevski (1887), puis de Flirt (1890), de Peints par eux-mêmes (1893), roman par lettres à la manière des Liaisons dangereuses, et de L'Armature (1895), où il évoque avec force le règne de l’argent et la destinée d’un nabab. Il y peint surtout les milieux aristocratiques avec un regard très critique, qui n’exclut cependant pas une fascination croissante. Venu tardivement au théâtre, il y a connu ses plus grands succès avec des tragédies modernes à préoccupations morales et sociales, où il défend les droits des femmes (plusieurs ont été créées à la Comédie-Française)   : Les Paroles restent (1892),  Les Tenailles (1895), La Loi de l'homme (1897), La Course au flambeau (1901), L'Énigme (1901), Le Dédale (1903), Théroigne de Méricourt (1903) et Le Réveil (1906). Hervieu, quoique dreyfusard (mais sans excès...), a été élu à l’Académie Française en 1900. Son style est souvent tarabiscoté et son œuvre théâtrale a bien vieilli, mais L’Inconnu, L’Armature et certains contes teintés de fantastique peuvent encore se lire.

Hervieu a été pendant longtemps l’ami le plus cher et le plus dévoué de Mirbeau, qui l’a introduit chez Goncourt et Mallarmé et l’a mis en relations avec Rodin et Monet. À partir de 1883, il devient son confident attitré et lui rend sans barguigner quantité de services, surtout quand son ami, ayant choisi de vivre en province, est éloigné de la scène parisienne, en particulier lors l’affaire Gyp, puis lors de sa rentrée au Figaro, fin 1887. C’est Hervieu qui réconcilie Mirbeau avec Alphonse Daudet, naguère vilipendé. Leurs nombreux échanges épistolaires constituent un document de première importance pour la connaissance des milieux journalistiques, littéraires, théâtraux et artistiques de la Belle Époque, parce qu’ils ne se cachent rien et qu’ils y rapportent sans complaisance, avec humour et distance, quantité d’observations et d’anecdotes révélatrices sur les spécimens d’humanité qu’ils rencontrent et face auxquels ils ressentent une fraternelle complicité. Cependant on sent que le ver est dans le fruit de l’amitié, quand Mirbeau constate avec amertume qu’Hervieu se met à fréquenter, beaucoup trop assidûment à ses yeux, des milieux aristocratiques et mondains, qui semblent l’attirer irrésistiblement. Serait-il à son tour contaminé par le snobisme, comme Paul Bourget et Maupassant, lors même qu’il a consacré aux snobs une série de chroniques nettement critiques ? Mirbeau le nie en public, mais en privé il cache de moins en moins son sentiment. L’engagement passionné de Mirbeau l’éloigne aussi de plus en plus d’un homme ambitieux, soucieux de sa carrière et excessivement prudent, et qui brigue sans vergogne tous les honneurs déshonorants dont se gausse son ami (Légion dite “d’honneur”, Académie Française, présidence de la Société des Gens de Lettres). Quand Hervieu refuse, comme Barrès, de signer la pétition européenne pour Gorki emprisonné, initiée par Mirbeau, fin janvier 1905, c’est la rupture : dès lors, Mirbeau ne verra plus en son ex-ami qu’un assoiffé de reconnaissance sociale, dont le talent s’est perdu, comme celui de Bourget.

Mirbeau a longtemps admiré en lui son humour très british, son sens du mystère, sa peinture de la pourriture du “monde”, et, plus bizarrement, son style, tout en le qualifiant d’« entortillé », ce qui implique qu’il n’est pas vraiment dupe de ses dithyrambes. Il lui a consacré de nombreux articles élogieux, pas toujours exempts d’une complaisance due à l’amitié et à la reconnaissance, notamment : « La Bêtise parisienne », Les Grimaces, 17 novembre 1883 ; « L’Alpe homicide », La France, 9 décembre 1885 ; « L’Inconnu », Le Gaulois, 24 juin 1887 ; « Paul Hervieu », L’Écho de Paris, 18 août 1891) ; « L’Armature », Le Journal, 24 février 1895 ; « Paul Hervieu », Le Journal, 28 septembre 1895.

P. M.


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