Thèmes et interprétations

Il y a 261 entrées dans ce glossaire.
Tout A B C D E F G H I J L M N O P Q R S T U V
Terme
DEMEURES

Petit-fils de deux notaires normands, Mirbeau est né le 16 février 1848 dans la grande maison de notable de son grand-père maternel à Trévières, village du Bessin (Calvados). Cette étude notariale est située dans la rue qui porte aujourd’hui son nom et qui est adornée d’une plaque offerte par son fidèle admirateur Sacha Guitry. Mais il n’y a pratiquement pas vécu et n’en a gardé aucun souvenir, car, dès 1849, il a regagné, avec ses parents, la maison de sa famille paternelle, à Rémalard, dans le Perche ornais. C’est dans la demeure bourgeoise du Chêne Vert, construite en 1857, située rue du Prieuré, à quelques encablures de l’église paroissiale, et entourée d’un vaste jardin dont le chêne éponyme, déraciné en 2000 par une tempête, était l’ornement, que le jeune Octave va passer toute son enfance. C’est là qu’il va s’imprégner de paysages qu’il ne cessera plus d’évoquer dans ses contes et ses romans, où réapparaissent nombre de lieux-dits percherons (Vauperdu, Culoiseau, Freulemont, La Fontaine au Grand-Pierre, etc.). C’est là aussi qu’il fera l’expérience de l’apartheid social régnant dans les bourgs de province et qu’il découvrira la mesquinerie, le conformisme et l’âpreté au gain de l’impitoyable petite bourgeoisie, qu’il ne cessera plus de débarbouiller au vitriol. C’est là enfin qu’il sera tôt sensibilisé à la misère et aux souffrances des petits paysans, des ouvriers agricoles et des chemineaux, victimes d’une société darwinienne où les pauvres sont écrasés sous le talon de fer des riches et des puissants.

Après ses études au collège des jésuites de Vannes, où il situe son émouvant roman Sébastien Roch (1890), puis à Rennes et à Caen, où il passe son bac, le jeune écrivain ambitieux “monte” à Paris en 1872 pour y entamer une carrière de journaliste, sous la houlette de l’ancien député de Mortagne, Dugué de la Fauconnerie. Dès lors, jusqu’à la fin de sa vie, moyennant un nombre impressionnant d’emménagements, il va faire alterner ses séjours à la campagne et ses installations parisiennes.

* À Paris, il a habité successivement : rue de Laval, dans les années 1870 ; rue Lincoln, près des Champs-Élysées, en 1885 ; square du Ranelagh, d’où le bruit le fait fuir au plus vite, en 1888 ; à Levallois, dans un immeuble appartenant à sa femme, en 1889 ; puis, en 1896, dans un pied-au-ciel sis au 42 avenue de l’Alma, où il organise des réceptions intimes le samedi ; dans un bel immeuble bourgeois du 3 boulevard Delessert, proche du Trocadero, à partir de 1897 ; dans un appartement de très grand standing, qu’il loue fort cher à la baronne von Zuylen, au 64 – devenu 84 – de l’avenue du Bois, de novembre 1901 à 1909 ; et enfin, pendant la guerre,  pour y mourir, au 1 de la rue Beaujon, à proximité de son médecin traitant, le professeur Albert Robin.

* À la campagne, plus ou moins proche de Paris, il s’est installé successivement – et provisoirement : pendant six mois en 1885, dans sa « chaumière » au Rouvray, sur la commune de Saint-Sulpice-en-Rille, près de Laigle (Orne), où il rédige ses Lettres de ma chaumière ; pendant la seconde moitié de 1886, dans une maison louée au Pélavé, à Noirmoutier (Vendée), où il achève Le Calvaire et reçoit la visite de Claude Monet ; en 1887-1888, à Kérisper, sur la commune de Pluneret, près d’Auray (Morbihan), dans un manoir avec tourelles et pont-levis, d’où il a une vue superbe sur le loch et sur le golfe du Morbihan et où il rédige L’Abbé Jules ; puis à Menton, Casa Carola, proche de la frontière italienne, en 1888-1889 ; de 1889 à l’hiver 1893, aux Damps, près de Pont-de-l’Arche (Eure), dans une grande maison de briques entourée d’un vaste jardin peint à quatre reprises par Camille Pissarro ; puis à Carrières-sous-Poissy (Yvelines), où il horticulte avec ferveur, dans une maison aujourd’hui détruite et sur l’emplacement de laquelle s’élève, depuis 1993, l’actuel hôtel de ville ; à partir du printemps 1904, dans un château du XVIIIe siècle, entouré d’un très beau parc, acheté par sa femme, et aujourd’hui méconnaissable, dans le village de Cormeilles-en-Vexin, dont il évoquera les habitants sous les couleurs les plus noires dans son dernier roman, Dingo (1913) ; et enfin dans une maison qu’il a fait construire à Triel-sur-Seine, dans les Yvelines, à partir de la fin 1909. Après sa mort, sa veuve en fera don à la Société des Gens de Lettres pour servir à la convalescence d’écrivains peu fortunés.

Voir aussi les notices Trévières, Rémalard, Laigle, Noirmoutier, Auray, Menton, Levallois, Les Damps, Carrières-sous-Poissy, Paris, Cormeilles-en-Vexin et Triel sur Seine.

P. M.

 

Bibliographie : Albert Fournier, « Parterres et châteaux de Mirbeau » , Europe, juin 1967, pp. pp. 191-212 (inséré dans Demeures du temps retrouvé, Paris, Les Éditeurs Français Réunis, 1971, pp. 151-178) ; Pierre Michel, « Les demeures d'Octave Mirbeau », site Internet de Terres d'écrivains, 14 juin 2006.


Glossary 3.0 uses technologies including PHP and SQL