Oeuvres

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Terme
VIEUX MENAGES

Vieux ménages est une comédie en un acte, créée au Théâtre d’Application le 20 décembre 1894, reprise en octobre 1900 au Théâtre du Grand-Guignol, avec Louise France, puis publiée chez Fasquelle en 1901, dans un petit volume de 35 pages, et enfin recueillie en 1904 dans Farces et moralités  (le titre est alors au singulier : Vieux ménage). Mirbeau y reprend, après l’avoir retravaillé, un dialogue paru dans Le Journal le 29 juillet, 1894, « Les Vieux ménages ». La pièce a été reprise plusieurs fois, notamment en 1989, dans une mise en scène de Jean-Loup Rivière, et en 1999, à la Comédie-Française, avec Alain Pralon et Martine Chevalier.

Mirbeau y traite de nouveau de l’enfer conjugal, dont il a une riche expérience, et illustre une nouvelle fois les turpitudes et la tartufferie de la bourgeoisie, dont la « respectabilité » n’est que faux semblants. Il met en scène un vieux couple anonyme, qui passe son temps à se déchirer, mais qui reste uni par la pourriture et la haine, qui sont des liens bien plus durables et solides que l’amour. Le Mari, « respectable » magistrat à la retraite, catholique proclamé, impitoyable aux pauvres, et qui prétend ne pas transiger avec ses principes de haute moralité, se révèle être un coureur de jupons et, à l’occasion, un amateur de chair adolescente susceptible d’encourir des poursuites judiciaires. Quant à la Femme, vieille podagre aigrie et solitaire, qui ne peut plus accomplir son « devoir conjugal », elle lui conseille cyniquement de jeter son dévolu sur sa nouvelle et jolie voisine divorcée, qui n’a donc plus de propriétaire en titre, plutôt que de lui « prendre [ses] bonnes », qu’elle se plaît à houspiller, dernier plaisir qui lui reste.

Ces personnages sont odieux, en tant qu’incarnations de l’ordre bourgeois, hypocrite et répressif, dont ils illustrent la férocité. Mais la vieillesse, l’incommunicabilité et une irrémédiable solitude sont aussi leur lot, et, en tant qu’êtres humains condamnés au mal-être inhérent à la condition humaine et qui en souffrent, malgré leurs sordides vilenies, il n’est pas totalement impossible d’éprouver pour eux un peu de pitié, d’autant qu’ils ne sont jamais que le produit, en même temps que le symptôme, d’une société profondément malade. Deux institutions sont particulièrement visées : la “Justice”, douce aux puissants, dont elle ignore les crimes, mais impitoyable aux pauvres, classe dangereuse ; et le mariage monogamique, qui n’est qu’un hypocrite maquignonnage au terme duquel les époux sont deux ennemis également frustrés et vindicatifs..

P. M.

 

Bibliographie : Georges Dupeyron, « Sur deux pièces d’Octave Mirbeau », Europe, juin 1967, pp. 189-191 ; Tomasz Kaczmarek, « Farces et moralités.d’Octave Mirbeau », Studia romanica posnaniensia, n° XXXII, Poznan, 2005, pp. 146-148 ; Pierre Michel,  « Introduction » à Vieux ménages, in Théâtre complet de Mirbeau, Eurédit, 2003, t. IV,  pp. 33-36

 

 

 

 


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