Familles, amis et connaissances

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Terme
WAGNER, richard

WAGNER, Richard (1813-1883), célèbre compositeur post-romantique allemand, qui a contribué à révolutionner la musique, et au premier chef l’opéra, conçu comme une dramaturgie sacrée, en tentant de créer un « art total », en écrivant lui-même les livrets et en recourant au leitmotiv (il y en a 80 dans la Tétralogie). Il a mené longtemps une vie errante et précaire, à Riga, Dresde, Zurich, puis Munich, Lucerne et, pour finir, Bayreuth, où il fit construire son propre théâtre, inauguré en 1876. À partir de 1864, il a bénéficié de la protection du roi Louis II de Bavière, qui l’admirait infiniment et l’a largement subventionné. Après Rienzi (1842), œuvre de jeunesse, Le Vaisseau fantôme (1843) et Tannhäuser (1845), qui souleva un scandale à Paris en 1861, Lohengrin (1850) et Tristan et Isolde (1865), il s’attaqua à la fameuse Tétralogie de L’Anneau des Nibelungen, inspirée de la mythologie germanique et à laquelle il travailla plus de vingt ans : L’Or du Rhin, La Walkyrie, Siegfried et Le Crépuscule des dieux. Son chant du cygne fut Parsifal (1882). Anarchisant et révolutionnaire dans sa jeunesse, il a subi l’influence de Schopenhauer et a adopté par la suite des positions antisémites et nationalistes, qui seront, quelques décennies plus tard, exploitées à leur profit par les nazis.

En France, Wagner s’est heurté à une vigoureuse et durable opposition des nationalistes et revanchards locaux et de tous ceux qui ont été ulcérés par ses propos de 1864 contre les Français, « peuple de singes », après l’échec de Tannhäuser à Paris (trois représentations seulement). En mai 1887, une émeute de pseudo-patriotes a réussi à empêcher la poursuite des représentations de Lohengrin à l’Eden-Théâtre, ruinant du même coup le pauvre Charles Lamoureux, mais suscitant en retour les protestations des wagnérophiles et des pacifistes, parmi lesquels Mirbeau. Dès 1876, il a en effet ironisé sur le compte de ces « braves bourgeois qui s’imaginent faire œuvre de patriotisme en poussant des cris furieux chaque fois qu’ils voient sur un programme s’étaler le nom de Wagner » (« À bas Wagner ! », L’Ordre de Paris, 17 janvier 1877) :  « Ils crient, aboient et hurlent aux notes de Wagner. [...] Le patriotisme a bon dos » (« Chronique de Paris », L’Ordre de Paris, 4 novembre 1876). Dix ans et demi plus tard, après la suspension de Lohengrin, il prend l’initiative d’organiser un grand banquet de 160 couverts en l’honneur de Lamoureux et pour la défense de la liberté de l’art, le 16 mai 1887, à l’Hôtel Continental, mais il n’y prend pas la parole

Cependant la germanophilie et le pacifisme de Mirbeau ne suffiraient pas à expliquer son enthousiasme pour Wagner. S’il le défend, c’est surtout parce qu’il admire en lui « la plus sublime expression de l’art au dix-neuvième siècle ». Certes, Wagner a d’abord été « honni » et « hué », « comme le sont tous les grands artistes, tous les grands novateurs qui viennent secouer la routine du monde ». Mais il est maintenant « partout acclamé », sauf en France, où, néanmoins, les rangs de ses admirateurs ne cessent de grossir, car il convient de désarmer « devant un génie tellement superbe qu’il n’appartient plus à un pays seulement, mais à l’humanité tout entière ». Ce « génie », qu’il classe parmi « les plus grands », il a de nouveau l’occasion de le goûter lors de l’unique représentation de Lohengrin, œuvre qu’il qualifie d’« immortelle », le 3 mai 1887. Il y éprouve « une émotion sacrée », et tous les auditeurs autour de lui, « même les plus sceptiques », ont senti « remuer en eux quelque chose de nouveau », comme si la musique de Wagner avait la puissance d’apporter « la paix et l’amour dans cette nacelle d’argent, que guide le blanc oiseau symbolique ». Rêve malheureusement détruite par « l’émeute, insultante et blagueuse » (« La Rue », Le Gaulois, 8 mai 1887).

P. M.

 

 

 

 

 

 

             


WERTH, léon

WERTH, Léon (1878-1955), journaliste, critique d’art et romancier engagé. Il a collaboré au Gil Blas, à Paris-Journal et aux Cahiers d’aujourd’hui. Ami et admirateur de Mirbeau, il a rédigé, sur ses directives, les derniers chapitres de Dingo (1913). La même année, La Maison blanche, roman autobiographique préfacé et promu par Mirbeau, est à deux doigts d’obtenir le prix Goncourt. Il est mobilisé et blessé pendant la première guerre mondiale. Il  publie ensuite des ouvrages rigoureusement antimilitaristes et anticolonialistes (voir Cochinchine, 1925). Soucieux de préserver son indépendance, il s’est opposé, non seulement au fascisme, mais aussi au stalinisme. Parmi ses œuvres, citons Clavel soldat et Clavel chez les majors (1919), remarquables et mirbelliennes démystification de la guerre, de la mentalité du troufion moyen et des médecins militaires,  Le Monde et la ville (1922), ainsi qu’une étude sur Pierre Bonnard (1923). On a publié en 1992 son Journal de guerre. Saint-Exupéry lui a dédié Le Petit prince.

            Léon Werth apparaît, non comme un disciple de Mirbeau – ce mot leur eût certainement fait horreur à tous deux –, mais comme son héritier, son successeur, voire son fils spirituel. Comme son aîné, il est un intellectuel libertaire, engagé avec fougue et véhémence dans les affaires de la cité, mais tout aussi politiquement incorrect, parce qu’il a toujours soigneusement préservé son esprit critique et sa liberté de parole, au risque de s’attirer bien des rancunes, jusque dans son propre camp. Comme Mirbeau, il est un réfractaire, un insoumis, anticlérical, antireligieux, antimilitariste, antipatriote, anti-parlementaire, anti-bourgeois, anticolonialiste, anti-collectiviste, qui jette sur les choses un regard décapant. Lui aussi est un pessimiste endurci qui ne se fait aucune illusion sur les hommes, mais n’en a pas moins continué de lutter pour ses valeurs, dans le vague espoir de changer les mentalités et d’améliorer une organisation sociale aberrante. Seule nuance : Werth était plus misanthrope et quelque peu sceptique face à ce qu’il appelle « l’évangélisme anarchisant » de Mirbeau.

On comprend dès lors qu’entre eux se soit nouée d’emblée une relation de totale confiance. Le vieux lion fatigué et malade n’étant pas en état d’achever Dingo, entamé depuis plusieurs années, il demande à son jeune ami d’en écrire les derniers chapitres à sa manière. Vivement reconnaissant, Mirbeau fait publier chez Fasquelle le premier roman de Werth, La Maison blanche, lui fait cadeau d’une belle préface et se bat jusqu’au treizième tour, mais en vain,  pour lui décrocher le prix Goncourt 1913. L’année suivante, alors qu’il n’est plus du tout en état d’écrire, il accepte néanmoins de préfacer, bien péniblement, sa brochure Meubles modernes. Lorsque, cinq jours après sa mort, Alice Mirbeau fait paraître dans Le Petit Parisien le prétendu « Testament politique d’Octave Mirbeau », concocté par Gustave Hervé, Léon Werth fait partie des rares amis à protester, mais, dans une presse soumise à la censure et patriote à tous crins, il ne parvient pas à publier l’article dans lequel il démontre irréfutablement qu’il s’agit d’un faux patriotique, trahissant ignominieusement la pensée du grand écrivain disparu et entachant  gravement son image. Par la suite, il rendra à maintes reprises hommage à son vieux camarade disparu, notamment dans les Cahiers d’aujourd’hui, en 1922,  dans un article sur Mirbeau journaliste, et dans la préface à une réédition des 21 jours d’un neurasthénique, en 1954.

P. M.

 

Bibliographie : Claude Herzfeld, « La Verve mirbellienne de Léon Werth », Cahiers Octave Mirbeau, n° 10, 2003, pp. 159-166 ; Gilles Heuré, L’Insoumis Léon Werth, Viviane Hamy, 2005, pp. 24-26, 54-65 et 90-94 ; Pierre Michel, « Octave Mirbeau et Léon Werth », Société Octave Mirbeau, 2007 ; Jean de Palacio, « Léon Werth, doublure, continuateur ou alter ego  », Dix-neuf  / Vingt, n° 10, octobre 2000, pp. 65-76.

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WHISTLER, james abbott mcneill

WHISTLER, James Abbott McNeill  (1834-1903), peintre américain qui a fait toute sa carrière en Europe, en Angleterre (il a longtemps vécu à Londres) et en France (il a étudié la peinture à Paris et, à l’occasion de ses nombreux séjours, il est devenu une figure de la vie parisienne). Il était lié d’amitié avec Mallarmé et Monet, et, par leur truchement, est devenu aussi l’ami de Mirbeau. Il a réalisé des paysages (de la Tamise, dont il a peint plusieurs nocturnes, et de Venise, notamment) et surtout de nombreux portraits : de sa mère (1871), de Lady Meux (1882), de Théodore Duret (1885), de Lady Dombasle (1885), de Pablo de Sarasate (1886) et de Robert de Montesquiou (1892). Il intitulait souvent ses tableaux par les contrastes de couleurs qui les caractérisaient, par exemple Symphonie en blanc, également connu comme La Fille en blanc (1862), Variations en violet et vert (1871), Arrangement en noir et gris (1871), Nocturne en bleu et or (1875), Harmonie en noir et rouge (1882),  Arrangement en noir (1884), ou Autoportrait en brun et or (1896), car, pour lui, c’est l'harmonie des couleurs qui importe seule, et non la représentation d’une réalité objective, raison pour laquelle il a pu être considéré par certains historiens de l’art comme un précurseur de la peinture abstraite. Mallarmé a traduit son Ten o’clock, conférence sur l’esthétique.

Mirbeau a longtemps manifesté pour Whistler une vive admiration, en dépit de ses gamineries et de son goût pour le scandale, la réclame, les dépenses inconsidérées et surtout pour la procédure (Whistler a, par exemple, intenté à Ruskin un ruineux procès en diffamation pour une critique un peu vive). En 1882, dans un article signé Demiton, il admire le portrait de Lady Meux, « une simple, belle et grande œuvre », où il y a, « dans l’harmonie générale du tableau, une mélancolie grandiose, qui fait penser à la Marche funèbre de Chopin » (Paris-Journal, 4 mai 1882). Trois ans plus tard, dans son « Salon », il qualifie Whistler de « portraitiste de race », avec « le charme sans rival de ses tonalités exquises » (« Le Salon I – Coup d’œil général », La France, 1er mai 1885), sa « délicatesse d’analyse » et son « mysticisme troublant » (ibid., 9 mai 1885) ; il admire particulièrement le portrait de Lady Dombasle, qui semble « brossé d’hier » et à travers lequel se révèle « toute une noblesse, toute une race », et il affirme que Whistler « a du style, et même un style qui lui est propre » (ibid., 26 mai 1885). L’année suivante, dans son « Salon » de La France, Mirbeau est admiratif devant « l’harmonie souveraine » du portrait de Sarasate, qui « dénote une habileté prestigieuse de dessinateur » et qui exprime « le caractère physique et le caractère moral de cette physionomie si intéressante » : « les passages du noir du noir du fond avec le noir de l’habit, ceux du noir de l’habit avec le blanc de la chemise et le ton enveloppé des chairs, sont ménagés avec une science étonnante » (24 mai 1886). Lors de l’exposition internationale de la rue de Sèze, un an plus tard, nouveau dithyrambe face aux « cinquante et un petits joyaux du prix le plus rare » présentés par le peintre américain, notamment des eaux-fortes « incomparables », qui n’ont d’égales que celles de Rembrandt, et un portrait de femme, « harmonie en noir, qui impressionne comme un mystère » (Gil Blas, 13 mai 1887). Dans son « Salon » de 1892, Mirbeau classe Whistler parmi les rares « élus » et admire particulièrement sa Place Saint-Marc, « avec ses architectures noyées de nuit » (Le Figaro, 6 mai 1892).

Par la suite, il n’est plus guère question de Whistler dans sa critique d’art, comme si la connaissance intime de l’homme avait ramené son admiration pour le peintre à des proportions plus modestes. Tout au plus Mirbeau voit-il en Whistler celui qui, par la connaissance qu’il en a, serait le mieux placé pour écrire « l’histoire du préraphaélisme, ce « prodige de folies esthétiques et d’erreurs morales », dont « il eut à souffrir » (« L’Homme au large feutre », Le Gaulois, 23 octobre 1896). C’est précisément par Whistler que Mirbeau a connu les dessous du curieux pacte passé, un quart de siècle plus tôt, entre le poète Dante Gabriel Rossetti et son disciple, le peintre William Morris, pour la possession de la sculpturale Jane Burden, épouse du second et maîtresse du premier : il en a tiré la matière première de sa chronique satirique intitulée « Intimités préraphaélites » (Le Journal, 9 juin 1895) et qui deviendra le chapitre X du Journal d’un femme de chambre, ajouté sur épreuves, au dernier moment.

En 1895, Mirbeau a accepté de seconder le peintre lors de ses démêlés avec l’écrivain George Moore, qui avait insulté Whistler dans un article de la Pall Mall Gazette : Whistler a alors chargé ses deux témoins, Mirbeau et Francis Viélé-Griffin, d'exiger soit une rétractation formelle, soit une réparation par les armes. Moore n’ayant pas répondu, l'affaire se termina par la publication d'un procès-verbal de carence dans Le Journal du 24 mars. Ce même jour, dans une chronique du Journal intitulée « Le Portrait de sa femme », Mirbeau évoquait le procès de Whistler avec un de ses clients, lord Eden, qui ne voulait payer un portrait grand format de son épouse que le dixième du prix habituel, amenant Whistler à ne pas livrer son œuvre, et il ironisait sur l’arrêt aberrant rendu le 27 février par le président Toutée, condamnant le peintre à rendre à Eden le portrait de sa femme, ainsi que les cent livres versées en paiement, à lui payer de surcroît mille francs de dommages-intérêts, et à supporter tous les frais du procès... Naturellement, Whistler fera appel et finira par  gagner, en 1896. Le jour même de la parution de l’article, il écrit à Mirbeau pour le remercier : « Je voulais surtout vous dire combien je trouve charmant et brillant le terrible “Portrait de sa femme” ! J’en suis ravi ! Étincelant de joie, qui est toujours l’arme des gentilshommes, et rayonnant de clarté, ce qui fait la terreur de nos ennemis ! / Et le tout sans effort, sans explication, enfin un petit chef-d’œuvre de gaieté ! Et la gaieté du vrai artiste rend fou l’imbécile qui est toujours coupable en lui mettant le désespoir dans l’âme ! / Je ne sais pas combien de numéros du Journal sont déjà partis pour Londres. »

P. M.

 

Bibliographie : Octave Mirbeau, « Le Portrait de sa femme », Le Journal, 24 mars 1895 ; Joy Newton, « Whistler, Octave Mirbeau and George Moore », Romance quaterly, volume 37, mai 1990, pp. 157-163.

 

 

 

 

 

 

 


WILDE, oscar

WILDE, Oscar (1856-1900), écrivain anglais anti-conformiste et décadent. Il a provoqué la société victorienne par son dandysme, ses multiples paradoxes et son amoralité revendiquée, et l’a choquée par son homosexualité affichée et sa liaison avec le jeune Alfred Douglas – qui lui valurent, en 1895, une condamnation à deux ans de hard labour. Il écrivit des poèmes (dont la célèbre et émouvante Ballade de la geôle de Reading, 1898), des contes, des pièces de théâtre à succès (L’Éventail de Lady Windermere, 1892, De l’importance d’être constant, 1895, Un mari idéal), des contes et des nouvelles (Le Crime de lord Arthur Savile, 1891), et surtout un roman, Le Portrait de Dorian Gray  (1891). Il écrivit aussi directement en français Salomé  (1893) pour Sarah Bernhardt. Il est mort à Paris, anonymement, ruiné et usé prématurément par la vie carcérale.

            A priori, sa réputation de dandy et de fabricant de bons mots n’était guère de nature à le faire apprécier de Mirbeau, qui n’avait que mépris pour ceux qui prétendaient afficher leur supériorité par leur tenue vestimentaire ou leurs mots d’esprit. L’esthétisme de Wilde, étranger à toute préoccupation politique, et son goût pour la peinture préraphaélite, exécrée par le chantre de Monet, n’étaient pas davantage de nature à les rapprocher : au chapitre X du Journal d’une femme de chambre (1900), Mirbeau n’hésitera pas à se moquer gentiment de Wilde, sous le masque transparent de sir Harry Kimberly, « fervent pédéraste », mais « tellement charmant », et fort bien introduit dans les milieux préraphaélites dont il distille quelques secrets. Quant à la pédérastie affichée du poète anglais, elle était de nature à créer un abîme avec l’auteur de Sébastien Roch, qui a conservé du traumatisme inaugural de ses années de collège une phobie pour l’homosexualité masculine. 

            Et pourtant, quand Wilde est condamné au hard labour, Mirbeau est un des rares, en France, à avoir pris sa défense dans deux articles du Journal, quotidien qui tire alors à 600 000 exemplaires : le 16 juin 1895, dans « À propos du hard labour », et le 7 juillet suivant, dans « Sur un livre ». Le relativisme culturel, l’impossibilité de définir ce qui est moral, et la dialectique de la pourriture et de la beauté, constituent autant d’arguments qu’il assène pour dénoncer « l’affreux supplice » infligé à « un parfait artiste » par une société qui se prétend civilisée, mais qui continue de recourir à de « vieilles coutumes barbares ». S’il passe par-dessus ses multiples réticences éthiques, politiques et esthétiques, c’est parce qu’il voit avant tout en Wilde la victime d’une féroce société de Tartuffes, et qu’il est impératif à ses yeux de le défendre face aux forces d’oppression, quelles que soient ses divergences par ailleurs. L’affaire Wilde lui sert aussi de révélateur de ce qu’il appelle « la gangrène morale » des sociétés modernes : loin d’être le propre de la seule Angleterre, c’est une tare caractéristique de l’ensemble des sociétés bourgeoises de l’époque, toutes également hypocrites et incohérentes : partout on se paye « de mots », parce que les mots ont pour mission, de camoufler les réalités sordides au lieu de les exprimer ; partout est ouverte la chasse aux génies et aux esprits libres, qui osent jeter sur les choses un regard neuf ou commettent le crime irrémissible « de mettre la Société en face d’elle-même, c’est-à-dire de son propre mensonge » (« À un magistrat », Le Journal, 31 décembre 1899).

C’est toute cette pourriture des sociétés occidentales qui s’exhibe à travers la condamnation de Wilde au hard labour. Mais c’est précisément sur cette pourriture que, selon Mirbeau, poussent les plus belles œuvres du temps, de même que les resplendissants parterres de fleurs du Jardin des supplices sont engraissés par les cadavres pourrissants des suppliciés innocents.

P. M.

           

Bibliographie : Pierre Michel, « Octave Mirbeau et Oscar Wilde », Rue des Beaux- Arts, n° 7, février-mars 2007 ; Liliane-Lou Ferreira, L’Ombre d’Oscar Wilde, Thélès-Elzévir, à paraître début 2010.

 

 


WILDER, andré

WILDER, André  (1871-1965), est un peintre français, auteur surtout de paysages et de marines. Il était le fils du musicologue et journaliste Victor Wilder, avec qui Mirbeau a eu un temps des relations amicales. Élève d’un certain Marius Michel, homonyme oublié du célèbre relieur d'art, mais aussi de l'académiste Gérôme, il a subi surtout l'influence de Claude Monet. Il a exposé au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts et au Salon d'automne.

En 1904, Mirbeau a préfacé l’exposition de quarante toiles du jeune peintre chez les frères Bernheim. Ce qui semble l’avoir intéressé, c'est surtout son émancipation culturelle. En dépit d'un enseignement artistique des plus réduits, Wilder a fini par trouver sa voie, au terme d'une véritable ascèse, et a pu enfin exprimer son « tempérament d'artiste » et vibrer d'émotion devant le spectacle de la nature, à l'instar de Van Gogh. Au lieu de ne retenir de cette nature  que des détails, comme les naturalistes frappés de myopie, ou des « anecdotes sentimentales », comme les peintres de genre à succès, il tâche d'en rendre le « mouvement cosmique » et les « rythmes élémentaires », dans la continuité de Monet et de Pissarro. De surcroît Wilder a peint des paysages que Mirbeau affectionne tout particulièrement : le port d'Anvers, les côtes flamandes et les canaux hollandais, que son ami Georges Rodenbach lui a fait visiter en 1896, et qu'il va bientôt traverser de nouveau et qu’il évoquera dans La 628-E8 (1907).

P.M.



Bibliographie : Pierre Michel, « Mirbeau et André Wilder », Cahiers Octave Mirbeau, n° 2, 1995 pp.  204-210.

 


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