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Anatole France
a dédié à Mirbeau, qui l’admirait en retour, ses articles recueillis
en 1893 sous le titre de : Les Opinions de Jérôme Coignard.
D’abord critique à son égard, parce qu’il le soupçonne de réclamisme,
Mirbeau s’est rapproché de lui à partir des années 1890 et, plus encore,
après l’affaire Dreyfus et lors de la bataille laïque du ministère Combes
et de la préparation de la loi de séparation des Églises et de l’État.
Ils sont devenus tous deux, au début du XXe siècle, l’incarnation
de l’intellectuel engagé dans les affaires de la cité et ont signé de
concert nombre de pétitions, notamment lors de la révolution russe de
1905 et de la constitution du comité des Amis du peuple russe. À la
demande d'Anatole France, Mirbeau a consacré un petit article aux Noces
corinthiennes lors de la reprise de cette œuvre de jeunesse,
en 1902. Le voici :
Médaillon Anatole FRANCE
«
Aujourd'hui. A trois heures, à l'Odéon, répétition générale des Noces
Corinthiennes de M. Anatole France. Il faut louer M. Paul Ginisty
de nous donner une grande joie d'art en mettant à la scène ce poème
dramatique d'une sensualité si délicieuse et d'une forme si pure.
Ce sera une fête comme nous n'en avons point souvent au théâtre, où
ce n'est point l'habitude que nous entendions de la beauté. Et il
faut espérer que cela deviendra au théâtre une chose aussi précieuse
que la première édition de ce livre, que les bibliophiles se disputent
à prix d'or...
M. Anatole
France est certainement le plus exquis écrivain de ce temps, dont
il est aussi le penseur le plus mâle et le plus hardi... Génie âpre
et charmant, on peut dire de lui qu'il a refait, en maints chef-d'œuvres,
l'enquête sociale. Ses livres resteront ; ils sont déjà restés. Philosophe,
poète, conteur, historien des hommes, des institutions et des mœurs,
- et maître en tout cela - d'une culture magnifique et précise, nous
lui devons aussi d'avoir conservé, en la continuant et en y ajoutant,
la grande gloire de notre littérature classique. Personne n'a un style
plus clair, plus souple, plus heureux, plus coloré, disant plus de
choses et gravant plus d'idées, et personne n'a su restreindre comme
lui son vocabulaire au strict nécessaire de l'expression verbale.
C'est l'enchantement et la force évocatrice, la puissance d'empreinte
du mot propre : chose qu'on ne connaît plus aujourd'hui.
Il faut
l'aimer déjà, comme on aime Montaigne, Rabelais, La Bruyère, Diderot....
»
Octave Mirbeau, Le Journal, 28 janvier 1902
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De nombreux articles de Mirbeau sur la littérature et le théâtre
ont été numérisés mais ne sont plus consultables, malheureusement,
à partir du catalogue du Fonds
Mirbeau de la B.U. d’Angers. Ils sont accesibles sur
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Les
deux volumes de Les Écrivains ont été numérisés et sont
visibles en lecture optique sur le site Gallica de la BNF.
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Gens
de théâtre a été numérisé et est accessible en lecture optique
sur le site Gallica de la B.N.F.
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