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Depuis près de
quatre ans, la Société Octave Mirbeau, modeste association loi 1901,
prépare la commémoration internationale de l'auteur de L'Abbé Jules
et des Farces et moralités, du chantre attitré de Monet, de Rodin et
de Van Gogh. D'emblée nous avons sollicité le soutien du Ministère de
la Culture, à commencer par le haut patronage et le coup de pouce indispensable
pour mobiliser les institutions culturelles de notre pays, afin qu'elles
puissent participer à cette mommémoration.
Quatre ministres
se sont succédé, à qui j'ai adressé quatre lettres par la voie postale,
du 28 novembre 2013 au 16 juin 2017. Totalement en vain, jusqu'à ce
jour. L'arrivée d'une ministre qui connaît, qui aime et qui édite la
bonne littérature suscitait de légitimes espérances, qui ont été cruellement
déçues. Sans doute ma lettre n'est-elle pas remontée jusqu'à la ministre,
que je ne saurais donc mettre en cause, et s'est-elle baladée, comme
les précédentes, dans différents bureaux de cette administration pendant
dix semaines. Jusqu'à ce que je reçoive, ce matin, 29 août, la lettre
ci-dessous, signée de M. Philippe-Georges Richard, au demeurant un homme
très poli et charmant, mais dont la seule mission, en l’occurrence,
était clairement d'enterrer définitivement l'affaire sous une pelletée
de compliments, histoire qu'on n'en parle plus.
Voici la lettre
que j'ai adressée, le 16 juin dernier, à Madame Françoise Nyssen :
Pierre MICHEL
Société Octave Mirbeau
10 bis rue André Gautier
49000 - ANGERS
02 41 66 84 64
michel.mirbeau@free.fr
http://mirbeau.asso.fr
http://www.mirbeau.org
http://mirbeau.asso.fr/dicomirbeau
http://michelmirbeau.blogspot.com
https://www.facebook.com/profile.php?id=100014340181373
Objet : commémoration internationale du centième anniversaire de
la mort d’Octave Mirbeau
À Madame Françoise NYSSEN
Ministre de la Culture et de la Communication
3, rue de Valois
75001 – PARIS
Angers, le 16 juin 2017
Madame la Ministre,
Je me permets
de vous contacter au nom de la Société Octave Mirbeau, que j'ai fondée
en novembre 1993, que je préside depuis lors et qui a notamment produit
vingt-quatre numéros des Cahiers Octave Mirbeau, d'un total
de 8 700 pages, et un monumental Dictionnaire Octave Mirbeau,
de 1 200 pages, qui est également accessible gratuitement en ligne
(http://mirbeau.asso.fr/dicomirbeau
; 737 000 visites).
Il se trouve
en effet que 2017 est l’année de la commémoration du centième anniversaire
de la disparition, le 16 février 1917, d’un de nos plus prestigieux
écrivains : Octave Mirbeau. Comme vous ne l’ignorez pas, Octave Mirbeau
n’est pas seulement un romancier novateur, traduit en une trentaine
de langues, et un dramaturge qui a triomphé sur toutes les scènes
du monde. Il est aussi un critique d’art d’une rare lucidité et extrêmement
influent, qui a, plus que tout autre, contribué à la reconnaissance
et à la gloire d’Auguste Rodin, Claude Monet, Vincent Van Gogh, Paul
Cézanne, Félix Vallotton, Camille Claudel et Aristide Maillol. Il
est enfin l’incarnation, avant Albert Camus, de l’intellectuel éthique,
qui met sa plume au service de ses idéaux, aussi bien que des déshérités
et des génies de l’art. C’est pourquoi la commémoration du centième
anniversaire de sa mort, le jour de son 69e anniversaire, a pris une
ampleur mondiale : la Belgique et l’Espagne, la Pologne et la Hongrie,
l’Italie et l’Algérie, la Tunisie et le Monténégro, les Etats-Unis
et l’Argentine, les Pays-Bas et la Grèce, etc., participent à l’hommage
international qui lui est rendu (voir http://mirbeau.asso.fr/colloques_publications.htm
et http://www.mirbeau.org/calendrier.html).
Multiples
et diverses sont en effet les initiatives qui ont été prises, à travers
le monde, à l’occasion de cette commémoration, qui témoigne éloquemment
de la reconnaissance d’Octave Mirbeau et de son importance, dans l’histoire
de la littérature et du théâtre, bien sûr, mais aussi dans celle des
beaux-arts et dans l’histoire politique et sociale. L’impressionnant
comité international de parrainage en apporte également le témoignage
: http://www.mirbeau.org/com.html.
Malheureusement,
à notre grand regret, nous n’avons, à ce jour, reçu aucun soutien
du Ministère de la Culture, pas même le haut patronage, purement symbolique,
vainement sollicité à plusieurs reprises, alors que l’Académie Royale
de Belgique nous a accordé aussitôt le sien et organise une journée
en l’honneur du maître écrivain, qui aura lieu le 18 novembre prochain.
C’est tout juste si Mirbeau a eu droit à une petite notice de 4 000
signes, dont j’ai été chargé, dans le volume 2017 de Commémorations
nationales…
C’est d’autant
plus maigre que, de son côté, après des tractations qui ont duré,
le Musée d’Orsay a, pour finir, inexplicablement refusé d’honorer
le chantre attitré de Monet, Van Gogh et Rodin ; et que, pour sa part,
la Comédie-Française a refusé de programmer cette année des œuvres
de l’auteur du plus grand triomphe du siècle écoulé, Les affaires
sont les affaires, lors même que Mirbeau est étroitement lié à l’histoire
de la Maison de Molière : c’est en effet au cours de la bataille des
Affaires qu’a été supprimé le comité de lecture, et c’est après la
bataille du Foyer qu’il a été rétabli…
Tout cela
est incompréhensible et totalement contraire, nous semble-t-il, aux
missions du Ministère et de ces grandes institutions culturelles publiques
de renommée internationale. C’est pourquoi, à l’instar de l’ensemble
du monde de la culture et, au premier chef, de tous les amateurs de
littérature, nous avons accueilli avec beaucoup d’enthousiasme et
d’espoir votre arrivée aux commandes du Ministère de la Culture. Car
la Société Octave Mirbeau et les mirbeauphiles du monde entier souhaitent
très vivement que les institutions de notre République puissent être
enfin associées à la commémoration internationale d’un grand écrivain
français, plus que jamais actuel, par sa lucidité, son engagement
et ses innovations romanesques et théâtrales, qui fait partie intégrante
de la richesse culturelle et patrimoniale de notre pays et qui contribue
à la diffusion et à la reconnaissance internationale de la langue
et de la littérature françaises.
Nous n’avons
jamais sollicité de subventions ministérielles et n’en sollicitons
pas davantage aujourd’hui : nous faisons avec les moyens du bord,
avec beaucoup de dévouement et d’huile de coude, et en mettant souvent
la main à la poche. Ce n’est peut-être pas habituel, chez les “cultureux”,
et peut-être cette modestie nous a-t-elle pénalisés depuis près de
quatre ans que nous travaillons à la commémoration Mirbeau. Mais nous
espérons qu’une éditrice de grande littérature telle que vous sera
sensible au travail réalisé, grâce au dévouement de tous les amateurs
et admirateurs du grand Octave à travers le monde. Si un coup de pouce
pouvait nous aider à toucher davantage de lecteurs et de spectateurs,
à motiver de nouveaux théâtres (notamment pour donner enfin en France
Rédemption, ou la folie du toujours mieux, d’Antoine Juliens d’après
Mirbeau, oratorio théâtral crée en Belgique en janvier grâce à la
Société Mirbeau), ou encore à permettre aux deux documentaires en
panne, faute de crédits, de trouver un financement et des débouchés,
nous en serions naturellement ravis et reconnaissants. Et nous sommes
prêts, au besoin, à en discuter avec des représentants de votre ministère.
Vous trouverez sur nos sites toutes les informations relatives à
la commémoration Mirbeau de 2017 :
* Le projet, extrêmement ambitieux et divers, tel que nous l’envisagions
il y a plus d’un an, au terme d’un long travail préparatoire : www.mirbeau.org/2017.html.
* La liste des colloques et des publications universitaires à travers
le monde. Les colloques du Sénat et de Morlaix ont déjà eu lieu, le
27 janvier et le 11 février, celui de la Sorbonne, le 25 mars, celui
d’Angers le 31 mars et le 1er avril et celui de Debrecen du 8 au 10
juin : http://mirbeau.asso.fr/colloques_publications.htm.
* Le calendrier des très nombreux et divers événements, notamment
des créations et des reprises théâtrales, en lien avec l’année Mirbeau
: www.mirbeau.org/calendrier.html.
* L’impressionnant comité international de parrainage, qui regroupe
des personnalités de 35 pays, écrivains, universitaires de toutes
disciplines, gens de théâtre, artistes, traducteurs, éditeurs et élus
: http://mirbeau.asso.fr/copa.html.
* Un
entretien, mis en ligne le 20 janvier par Diacritik
* La
page Facebook de la Commémoration Octave Mirbeau
* La
page Facebook de la Société Octave Mirbeau
* La
page Facebook de Rédemption, ou la folie du toujours mieux, l’oratorio
théâtral d’Antoine Juliens, d’après Mirbeau, qui vient d’être édité
en Belgique et qui, je l’espère, pourra trouver des points de chute
en France
Dans cet espoir, et au nom de la Société Octave Mirbeau, je vous
prie d'agréer, Madame la Ministre, l'assurance de mes sentiments respectueux
et totalement dévoués à la cause mirbellienne, que je sers depuis
un demi-siècle.
Pierre MICHEL,
Agrégé de Lettres modernes, Docteur ès Lettres,
H. D. R.Chercheur associé à l’Université d’Angers
Président de la Société Octave Mirbeau
Rédacteur en chef des Cahiers Octave Mirbeau
P.S. Sont également accessibles sur nos sites Internet :
- Un bilan des vingt premières années de la Société Mirbeau : http://mirbeau.asso.fr/20ans.htm
- Un dossier commémoration, élaboré il y a quatre ans, présentant
Mirbeau, la Société Mirbeau, les sites Mirbeau, les spectacles Mirbeau,
etc. : http://mirbeau.asso.fr/dcomsomaccueil/Commemoration2017.pdf
(ou sur
: www.scribd.com/doc/187195772).
- Le monumental Dictionnaire Octave Mirbeau (1 200 pages dans sa
version papier, 737 000 visites) : http://mirbeau.asso.fr/dicomirbeau.
- Ma
Bibliographie d’Octave Mirbeau.
* * *
Voici maintenant
la réponse reçue du Ministère de la Culture, par le truchement de M.
Philippe-Georges Richard :
* * *
Pour pouvoir
bien apprécier la vacuité de la réponse officielle du ministère, il
convient de savoir :
- Que le haut patronage du ministère ne nous a jamais été accordé
et qu'il n'en a même jamais été question dans les réponses dilatoires
que nous avons reçues.
- Que personne, au ministère, n’a été chargé de suivre la commémoration
et de nous aider de ses conseils, comme nous l’avions humblement demandé.
- Que personne, au ministère, n’a cru devoir prendre contact avec
la Société Mirbeau pour voir ensemble ce qu’il serait possible de faire
à l’occasion de la commémoration internationale du grand écrivain français.
- Qu'aucune DRAC ne nous a apporté le moindre soutien, les projets
en cours dans les régions concernées n'entrant jamais, paraît-il, dans
leurs objectifs...
- Que le Musée d'Orsay a refusé de participer à la commémoration,
après des mois de vaines discussions et d’atermoiements (mais nous espérons
beaucoup de la nouvelle conservatrice).
- Que la Comédie-Française n'a monté aucune œuvre de Mirbeau et n'a
même pas accepté une conférence sur Mirbeau et la Comédie-Française.
- Qu'aucun institut culturel français à l'étranger ne nous a adressé
la moindre proposition, alors que se multipliaient les initiatives dans
quantité de pays et que des intellectuels d’une quarantaine de pays
nous ont apporté leur parrainage.
- Que les deux documentaires sur Mirbeau, dont la Société Mirbeau
a avancé les fonds nécessaires à l'écriture des scénarios, se sont perdus
dans les sables et qu'aucune chaîne publique n' a manifesté le désir
de les mener à terme et de les diffuser.
- Que l'oratorio théâtral d'Antoine Juliens, Rédemption ou la folie
du toujours mieux, d'après des romans de Mirbeau, créé en janvier 2017
dans le Luxembourg belge, n'a pas trouvé de points de chute en France,
malgré tous les efforts de la Société Mirbeau.
- Que le ministère, pour sa part, n'a pris aucune initiative, n’a
fait aucune proposition, n’a rien fait pour relayer l’information dans
les institutions culturelles en France et à l'étranger, n'a pas sollicité
de projets, etc…
- Et que, pour finir, la seule action à mettre au crédit, si j'ose
dire, du ministère, a été de… me demander une notice de 4 000 signes
(sic !) sur Octave Mirbeau, pour le volume 2017 de Commémorations
nationales, notice que j'ai remise à M. Richard et qui a été effectivement
publiée. (Voir France
Archives)
La Société Octave
Mirbeau, heureusement relayée par des mirbeauphiles dévoués à travers
le monde, et avec le modeste soutien de cinq municipalités, et celui,
plus conséquent, de l'Académie des Sciences, héritière de Mirbeau; a
donc dû prendre en charge toute seule une masse de manifestations.de
toutes sortes : publications, traductions, colloques, créations ou reprises
théâtrales, lectures, conférences, animations diverses... Le résultat
dépasse toutes nos espérances. Mais, tout de même…
Reste à savoir
pourquoi l'État nous a aussi lamentablement laissés tomber. Pour l'anarchiste
Mirbeau, l'État n'était, de son temps, qu'un vulgaire suceur de sang
et qu’un instrument d’oppression : « L'État pèse sur l'individu d'un
poids chaque jour plus écrasant, plus intolérable. De l'homme qu'il
énerve et qu'il abrutit, il ne fait qu'un paquet de chair à impôts.
Sa seule mission est de vivre de lui, comme un pou vit de la bête sur
laquelle il a posé ses suçoirs. L'État prend à l'homme son argent, misérablement
gagné dans ce bagne : le travail ; il lui filoute sa liberté à toute
minute entravée par les lois ; dès sa naissance, il tue ses facultés
individuelles, administrativement, ou il les fausse, ce qui revient
au même. »
Est-ce cela qu'on
lui a fait payer, un siècle après sa mort ?
Pierre MICHEL,
Président de la Société Octave Mirbeau
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