La Belle Madame Le Vassart (1884)

 

Paru sous le pseudonyme d’Alain Bauquenne, “La Belle Madame Le Vassart” traite un sujet voisin de celui de La Curée de Zola, auquel le titre fait ouvertement référence (Renée y était surnommée « la belle Madame Saccard »). Mais le romancier introduit des changements d’importance dans le traitement du conflit œdipien qui constitue le nœud dramatique :

- Il en déplace l’action d’une vingtaine d’années, de l’Empire à la Troisième République, ce qui en modifie la portée politique.

-  Le trio de personnages au centre de l’action, le père, le fils et la jeune épouse, est fort différent, ce qui renouvelle notablement leurs relations et leur confère une tout autre portée psycho-sociologique.

- Et, surtout, il n’y a pas de consommation de l’inceste entre la séduisante et jeune belle-mère et son beau-fils, compositeur de talent, qui n’ose transgresser l’interdit, même après la mort de son père, dont il se sent coupable : c’est précisément cette non-consommation qui déclenche la tragédie, et qui, du même coup, chamboule complètement la portée morale que Zola entendait donner à son roman. Chez Mirbeau-Bauquenne, loin d’être la solution, la famille bourgeoise apparaît au contraire comme le problème, et au premier chef le pouvoir, l’image et la loi du père, que le romancier remettra de nouveau en cause dans Le Calvaire, Sébastien Roch et Dans le ciel.

Deux autres différences sont à noter :

- Pour la psychologie des personnages, il refuse le schématisme zolien, qu’il juge par trop réducteur, et il s’emploie à mettre en scène des êtres vraiment vivants, c’est-à-dire complexes, contradictoires et fluctuants.

- Quant à la théâtralité affichée du dénouement, frénétique à souhait, elle nous éloigne des prétentions du romancier naturaliste au réalisme, et apparaît même – signe de modernité – comme une distance prise par rapport au récit lui-même, voire comme une forme d’autodérision que jamais Zola ne s’est permise.

Comme L’Écuyère, il s’agit d’une tragédie dont le dénouement est inscrit dans les données initiales et où se combinent les déterminations psychologiques et sociologiques. Et Mirbeau-Bauquenne y exprime une vision très pessimiste de l’amour et des relations entre les sexes, qui reposent sur un perpétuel malentendu.

Préface

• Une édition critique de La Belle Madame Le Vassart a été réalisée par Pierre Michel, et figure en annexe du tome II de l’Œuvre romanesque de Mirbeau, Buchet/Chastel / Société Octave Mirbeau, 2000.

• Le texte du roman est accessible sur le site Internet des éditions du Boucher, avec une préface de Pierre Michel.

 
 

  Romans

 
 

L'Ecuyère, La Maréchale, Dans la vieille rue, La Duchesse Ghislaine, Le Calvaire, L'Abbé Jules, Sébastien Roch, Dans le Ciel, Le Jardin des supplices, Le Journal d'une femme de chambre, Les 21 jours d'un neurasthénique, La 628-E8, Dingo, Un Gentilhomme.

 
 
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