Thèmes et interprétations
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JARDINAGE |
Octave Mirbeau adorait la nature. Il le dit dans des textes, dans des œuvres : « Je vous dirai que j’aime les fleurs d’une passion presque monomaniaque. Les fleurs me sont des amies « silencieuses et violentes », et fidèles. Et toute joie me vient d’elles » (« Le Concombre fugitif »). « Moi, j’en arrive à trouver une motte de terre admirable et je reste des heures entières en contemplation devant elle. Et le terreau ! J’aime le terreau comme on aime une femme » (lettre à Claude Monet, septembre 1890). Il ne se satisfaisait pas d’aller à la rencontre des fleurs des prairies, des forêts, des montagnes, il pratiquait le jardinage. Mirbeau a habité plusieurs maisons à la campagne, il disposait de jardins, parfois fort grands. Il est attentif à ce qui pousse dans ses jardins, jardins de fleurs, jardins potagers. Il accueille dans son jardin de nombreux visiteurs. Entre autres Edmond de Goncourt, reçu en juillet 1895 : « […] dans le jardin, dans le petit parc, des plantes venues de chez tous les horticulteurs de l’Angleterre, de la Hollande, de la France […] c’est un plaisir de voir Mirbeau, parlant de ses plantes, avoir dans le vide des caresses de la main, comme s’il en tenait une » (Journal). En 1907 Paul Gsell est entraîné dans le jardin potager : « Nous entrâmes dans un grand enclos dont les murs étaient revêtus par des treilles de raisins ambrés, par des espaliers de pêches pourpres et de poires ravissantes. Des carrés de choux, de carottes, de tomates, de cardons étaient bordés par des noueux pommiers […]. Mirbeau m’indiquait les améliorations qu’il projetait […] » (La Revue, 15 mars 1907). Mirbeau fréquente des horticulteurs – Truffaut, Vilmorin, Godefroy-Lebeuf (il a collaboré anonymement à deux périodiques de cet horticulteur d’Argenteuil) –, il échange des plantes, en particulier avec Claude Monet installé à Giverny. Dans de nombreuses lettres au peintre dont il est l’ami il parle avec enthousiasme des plantes récemment acquises, il l’invite à le rejoindre dans son propre domaine (« Nous causerons jardinage […] », écrit-il dans une lettre de septembre 1890), il lui demande conseil (« J’aurai bien […] des questions de jardinage à vous faire », dans cette autre lettre de décembre 1890). Mirbeau a suivi de très près l’élaboration des jardins de Giverny. Il est en terrain familier. Le jardinier-chef, Félix Breuil, est le fils du jardinier de son père à Rémalard, il dialogue avec lui comme il dialogue avec le jardinier en charge de sa propriété. Il peut se flatter d’être intervenu auprès du préfet de l’Eure afin que Monet réalise son rêve, avoir un jardin d’eau. Fervent jardinier, Mirbeau a décrit avec fougue les jardins de Claude Monet à différentes saisons dans un article de L’Art dans les Deux Mondes, 7 mars 1891). Un autre ami peintre, Camille Pissarro, possède un jardin. De là des échanges à propos de fleurs et de légumes. Il est effondré quand la nature contrarie ses espoirs de floraison : « Ici, rien ne pousse, et à part des roses, rendues horribles par la pluie, je n’ai pas une fleur, pas une ! » (à Claude Monet, juillet 1890) ; « Je crois bien que ce soir [suite à la tempête] il ne va plus rien rester de mon jardin. Les lys magnifiques sont couleur de cachou, rôtis, dévorés. […] » (à Claude Monet, juillet 1895). À la fin de sa vie, il est gravement malade. Il rend visite, avec d’autres écrivains de l’Académie Goncourt, à Claude Monet. Lucien Descaves se souvient de leur passion commune pour les fleurs : « Ils échangeaient des noms, des adresses, des caprices de collectionneurs » (L’Œuvre, 11 décembre 1926). On ne s’étonnera donc pas de cette dédicace de Remy de Gourmont : « À Octave Mirbeau, parce que je l’aime beaucoup et aussi parce que Phocas était jardinier » (Phocas, L’Ymagier, 1895).
G. Po.
Bibliographie : Marianne Alphant, Claude Monet, une vie dans le paysage, Hazan, 1993, pp. 562-564 ; Eva Figes, Lumière [1983], traduit de l’anglais par G. Barbedette, Rivages, 1989 ; Octave Mirbeau, Correspondance avec Claude Monet, édition établie, présentée et annotée par Pierre Michel et Jean-François Nivet, Du Lérot éd., 1990 ; Octave Mirbeau, Combats esthétiques 1, Séguier, 1993, pp. 428-433 ; Octave Mirbeau, Monet et Giverny, Séguier, coll. Carré d’art, 1995, pp. 7-21.
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