Familles, amis et connaissances

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Terme
FERAUDY, maurice de

 FERAUDY, Maurice de ( 1859-1932), est entré au Conservatoire d’Art dramatique en 1878. Il y est l’élève de Got, l’un des meilleurs acteurs du dix-neuvième siècle, interprète favori d’Emile Augier et spécialisé dans les rôles marqués. Féraudy obtient en 1880 le premier prix de comédie et entre tout de suite à la Comédie-Française. Il succède à Got au Conservatoire  et il y enseigne une dizaine d’années. Il prend sa retraite en 1930  et continue à jouer sur les boulevards.  Il joue dans  plusieurs  films, entre autres  Crainquebille de Jacques Feyder ( 1922) et Les Deux timides de René Clair (1928). Il taquine volontiers la plume. Il publie un recueil de poésies, Heures  émues (1896) ; il tire une pièce, Brichanteau (1905), du roman de Claretie qui raconte l’histoire d’un comédien de province et écrit une quinzaine de gentilles comédies de salon.Il écrit aussi des paroles pour des valses chantées comme Amoureuse  et Fascination.  

Les relations de Mirbeau  et de Féraudy commencent lorsque Claretie  décide, en octobre 1901, de jouer Les affaires sont les affaires. Comme les audaces  de la pièce l’effraient un peu, il  tarde à la mettre en répétitions. Mirbeau, agacé, décide d’intervenir près des comédiens. Il propose en novembre 1902 le rôle du jardinier à Féraudy (I, 2) et il  lui demande de se charger de la mise en scène. Il le prie également d’assister chez lui à une lecture des Affaires. Féraudy décline les offres de Mirbeau et lui déclare – mais son témoignage est peut-être sujet à caution – qu’il se sent capable d’interpréter le rôle de Lechat. Les répétitions commencent en 1903 ; le rôle de Lechat échoit à Silvain ;  il excelle  dans les personnages  lents et réfléchis  comme Auguste, Prusias, Tartuffe, mais il  ne se sent pas à l’aise dans le rôle de l’agité Lechat et il  conseille  en janvier de  le confier  à Féraudy. Celui-ci se met à la tâche et il trouve –  toujours selon ses dires –, huit jours avant la générale, que, dans la scène  2 de l’acte III, Lechat écrase le marquis de Porcellet. Il demande à Mirbeau d’étoffer les répliques du marquis  pour que le dialogue soit plus équilibré. Mirbeau  suit son conseil et modifie son texte. La première a lieu le 20 avril 1903 et Féraudy, à la fois burlesque et terrible, y est éblouissant. Mirbeau,  ravi,  le couvre de compliments  et de protestations d’amitié. Il lui écrit le 22 avril : « Vous avez donné à Isidore Lechat – et cela miraculeusement – non seulement sa stricte enveloppe physique, ses habitudes de famille, ses gestes, ses tics, sa marque sociale mais encore et surtout son âme » Quelques  nuages  surviennent cependant. Mirbeau reproche en 1904 à Féraudy d’être défaillant dans une tournée organisée par Hertz pour Les Affaires,  et il se plaint que la Comédie-Française ne joue pas assez souvent sa pièce. La rancœur s’apaise vite. Mirbeau écrit en 1905 dans L’Album de la Comédie-Française un article très élogieux sur Féraudy, dans lequel il le félicite  pour la variété de son talent. Il souhaite la même année qu’il se charge du rôle du baron Courtin du Foyer . Il lui écrit : «  Vous aurez dans Le Foyer un rôle qui  ne sera pas commun et avec lequel vous pourrez, je crois, étonner bien du monde » et il caractérise ainsi ses personnages : « Tous mes personnages, des canailles selon le monde, sont attendrissants à force d’humanité et infiniment plus sympathiques que s’ils étaient des héros de vertu. »  Il envisage en même temps d’écrire une pièce sur la terre dans laquelle Féraudy aurait « un rôle de paysan, âpre, intelligent, philosophe,  pittoresque ». La première du Foyer a lieu le 7 décembre 1908 après que Mirbeau et son collaborateur,  Natanson, ont gagné un procès contre Claretie. Huguenet interprète Courtin et Féraudy donne à Biron un aspect à la fois brutal et comique. Féraudy joue, un an ou deux après, la pièce dans une grande tournée qui le mène en Grèce, en Roumanie et en Egypte ; Mirbeau lui écrit qu’il est certain qu’il y a été admirable ; il regrette que le gouvernement jeune-turc ait interdit la pièce et y voit une manœuvre de Claretie... Il  lui assure, avec une férocité feinte, que son prochain livre, Dingo, contiendra un portrait allusif de Claretie dont il mourra. Il lui  déclare avec mélancolie : « D’ailleurs, c’est fini, le théâtre, les juifs et les directeurs l’ont tué. Soyez sûr que d’ici dix ans il n’en restera pas un seul qui pourra vivre. »  L’allusion aux juifs vise probablement Bernstein qui lui avait intenté en 1907 une déplaisante querelle. Le chapitre sur Claretie ne paraît pas dans Dingo parce que, en 1912, Féraudy a réconcilié   Mirbeau avec son ennemi. Féraudy joue la pièce au moins 1200 fois jusqu’en 1928, mais sa composition perd au fil des ans  un peu de son relief. 

P. B

 

Bibliographie : Octave Mirbeau, « M. Maurice de Féraudy », in La Comédie-Française - Les sociétaires par les auteurs, 1905. Voir aussi le dossier Mirbeau de la bibliothèque de la Comédie-Française, les dossiers RT 7508/ 7522  du département des ASP de la B.N.F., et les tomes III (2009) et IV (à paraître) de la Correspondance générale de Mirbeau.


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