Familles, amis et connaissances
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MORISOT, berthe |
MORISOT, Berthe (1841-1895), peintre, dessinatrice et graveure française. Appartenant à une famille bourgeoise, elle prend très tôt des leçons de dessin et de peinture. Élève de Corot, elle travaille sur le motif et exécute des copies au Louvre, où elle rencontre Fantin-Latour, qui la présente à Manet. À partir de 1868, elle pose fréquemment pour lui (Le Balcon) et fréquente son atelier, où elle fait la connaissance de son frère Eugène, qu’elle épouse en 1874. La même année, faisant fi de l’opposition de Manet, elle expose pour la première fois avec les impressionnistes. Elle participera ensuite à toutes les expositions du groupe, sauf en 1879, en raison de la naissance de sa fille Julie. L’univers qu’elle peint est souvent familial et intimiste (Le Berceau, 1872, Musée d’Orsay). Par ailleurs, ses paysages, comme ceux de ses camarades, sont faits de jardins, de jeux d’eau et de lumière, mais avec des harmonies de blanc et de couleurs tendres qui lui sont personnelles et une écriture nerveuse qui rattache son art au XVIIIe siècle, à Fragonard en particulier (Eugène Manet et sa fille dans leur jardin de Bougival, 1881, Musée Marmottan). À la fin des années 90, sous l’influence de Renoir, elle abandonne les touches virgulées pour un modelé plus strict. Elle meurt prématurément d’une mauvaise grippe. Ses camarades impressionnistes organisent alors, chez Durand-Ruel, une vaste rétrospective de ses œuvres, avec une préface de Mallarmé, son ami de longue date. Selon Théodore Duret, premier historien du mouvement, elle appartient, avec Monet, Sisley, Renoir et Pissarro, au « groupe primordial des impressionnistes ». La postérité lui a donné raison, même si Berthe Morisot reste la plus méconnue des grands impressionnistes, n’ayant pas bénéficié de rétrospective récente. Mirbeau la mentionne pour la première fois dans la presse en 1885, à propos de « ses études parisiennes si délicieuses et ses femmes si charmantes » (Combats esthétiques, I, 123). Rendant compte, l’année suivante, de la huitième et dernière exposition des impressionnistes, le critique donne une définition de l’art de Morisot dont il se dit troublé : « Il y a, dans ses œuvres exquises, je ne sais quel au-delà de curiosité maladive qui étonne et qui charme. Mme Morisot semble peindre à pointe de nerfs ; elle a des indications très sommaires qui sont de complètes et inquiétantes évocations. Quelques coups de pinceaux, deux ou trois touches pâles et délavées d’aquarelle, et cela vous émeut et vous fait rêver » (Combats esthétiques, I, 277). Curieusement, Mirbeau ne dit rien de la rétrospective posthume de 1896, mais il continue de louer « ces Berthe Morisot, enlevés comme à pointe de nerfs, et si délicieusement, si profondément féminins !... » (Combats esthétiques, II, 314). En 1909, dans sa Préface au catalogue du Salon d’automne, passant en revue les artistes auxquels le Salon rendit hommage, Mirbeau fait une place, dans son énumération, à « la vibrante et enchanteresse Berthe Morisot, qui peignit les femmes, les jardins, les serres et les eaux, en pleine sensibilité suraiguë et comme à pointe de nerfs, et qui, avec plus de grâce, peut-être, avec autant d’accent et un éclat pareil, devint l’émule de Manet, après avoir été son élève » (Combats esthétiques, II, 486). Mirbeau possédait deux œuvres de cette artiste : un tableau et une aquarelle, tous deux peints « à pointe de nerfs », bien sûr.
C.L.
Bibliographie : Stéphane Mallarmé - Berthe Morisot, Correspondance (1876-1895), Lausanne, Bibliothèque des Arts, 1995 et 2009 ; Octave Mirbeau, Combats esthétiques, tomes I et II, Paris, Séguier, 1993.
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