Familles, amis et connaissances

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Terme
BRIAND, aristide

BRIAND Aristide (1862-1932), est, avec Clemenceau, Jaurès et sans doute Poincaré, un des quatre hommes politiques français de premier rang à la veille de la Première Guerre Mondiale. Cet avocat, né à Nantes dans un milieu modeste, grandit à Saint-Nazaire, marqué par la rude condition ouvrière sur les Chantiers de l’Atlantique, mais aussi par sa rencontre avec Jules Verne, auquel il inspire le personnage de Briant : «  peu travailleur, quoique intelligent, il lui arrive souvent d‘être un des derniers. […] Cependant, quand il le veut, avec  sa facilité d’assimilation, une remarquable mémoire, il s’élève au premier rang, un peu débraillé, par exemple et manquant  de tenue. Par le génie de l’écrivain Briand est déjà dans Briant, y compris cette réputation de paresse entretenue par l’homme politique qui méprisera toujours les postures laborieuses d’un Clemenceau ou d’un Poincaré. Avocat anarchisant à ses débuts, militant dreyfusard auprès de Mirbeau, mais pragmatique en même temps qu’homme de conciliation doté d’un charisme oratoire exceptionnel, Briand assure en 1905 le succès de l’épineuse loi de séparation des Églises et de l’État, toujours d’actualité, avant  d’assumer plusieurs fonctions ministérielles avec réalisme, votant par exemple la loi portant à trois ans la durée du service militaire à la veille de la guerre, tout en prônant une cogestion des entreprises, encore iconoclaste dans la France actuelle, l’abolition de la peine de mort ou le vote des femmes. Sur ces derniers points, Briand est sans doute plus progressiste qu’un  Mirbeau viscéralement misogyne et n’ayant, comme la plupart des intellectuels, qu’une approche livresque du monde de l’entreprise. Leurs relations, comme celles de Mirbeau avec Clemenceau, se dégradent dès que ces hommes politiques accèdent aux responsabilités exécutives. En 1914 Briand jouera au gouvernement un rôle essentiel, en luttant contre l’hégémonisme défaitiste du haut État-Major au moment de la bataille décisive de la Marne et en rétablissant l’autorité du pouvoir civil sur l’armée.  Après lui avoir reproché de chercher à mettre fin à un conflit atroce par la négociation, Clemenceau l’écartera de la préparation du désastreux traité de Versailles, matrice de la Deuxième Guerre Mondiale, dont Briand, l’homme de Locarno, de la S.D.N. et de la réconciliation avec une Allemagne encore démocratique, s’efforcera de conjurer les périls jusqu’à sa mort d’épuisement, en 1932, après une carrière politique sans équivalent par la durée et la densité.

Après leur rencontre en 1892 dans l’atelier du peintre Maxime Maufra, l’anarchiste Mirbeau et le socialiste Briand  se retrouveront  en 1898 au sein de la Coalition révolutionnaire pour faire front à la Ligue des patriotes soupçonnée de préparer un putsch en pleine crise dreyfusarde, avant de participer ensemble à la création de L’Humanité, en 1904. Briand n’est encore que député, personnage-clé il est vrai de la commission parlementaire qui prépare la loi de Séparation, quand apparaissent les premières divergences entre eux, Mirbeau comme Clemenceau étant partisans d’une attitude plus radicale que celle de Briand, appuyé par Jaurès et Léon Blum. Mais la réquisition des cheminots de la Compagnie du Nord lors de la grève de 1910 par un Briand , président du Conseil, qui défend « le droit de la société à vivre » supérieur au droit de grève, apparaîtra à Mirbeau comme la  confirmation de la trahison des renégats , Briand et Clemenceau. Cependant Clemenceau sera présent aux obsèques de Mirbeau et Briand, ministre de l’Instruction publique et des Cultes, Garde des Sceaux ou président du Conseil ne fermera jamais sa porte à l’auteur dramatique venu solliciter son aide dans son conflit avec Claretie l’administrateur-dictateur de la Comédie-Française, ou un emploi pour  Paul Léautaud, auteur impécunieux et misanthrope pathologique. On ne saura jamais ce que Mirbeau eût  pensé du Briand homme de paix succédant au chef de guerre, de l’homme de Locarno, de la S.D.N. et de la réconciliation avortée avec l ‘Allemagne. On peut le regretter.

A. Ge.

 

Bibliographie : Pierre Michel, « Aristide Briand, Paul Léautaud et Le Foyer », Cahiers Octave Mirbeau, n° 15, 2008, pp. 218-233 ; Gérard Unger, Aristide Briand,  Fayard, 2005.


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