Familles, amis et connaissances

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Terme
COQUELIN, constant

COQUELIN, Constant (1814-1909), dit Coquelin aîné, célèbre acteur français. Entré à la Comédie-Française en 1860, sociétaire quatre ans plus tard, il l’a quittée en 1886, y est revenu comme pensionnaire en 1890, puis a joué au théâtre de la Renaissance, avant de prendre la direction du théâtre de la Porte Saint-Martin. Il a fait de nombreuses tournées à l’étranger, y compris en Allemagne et aux États-Unis, et y a connu de vifs succès. Il s’est notamment illustré dans Tartuffe, Ruy Blas, Thermidor, de Sardou, Scarron, de Catulle Mendès, L’Aiglon et, surtout, Cyrano de Bergerac, d’Edmond Rostand (1897). Il s’est aussi spécialisé dans les monologues et a publié un Art de dire le monologue. En 1903, il a lancé le projet d’une maison de retraite pour vieux comédiens, à Couilly (Seine-et-Marne) ; ouverte en 1905, elle fonctionne encore aujourd’hui.

Coquelin est une des cibles favorites de Mirbeau, parce que c’est lui qui incarne le mieux, à ses yeux, le grand comédien, « celui dont on dit qu'il est un artiste, à qui les femmes écrivent des lettres d'amour, qui va dans le monde, non point comme un salarié de plaisir, mais comme un visiteur de luxe dont on s'enorgueillit ; qui gagne 100 000 francs par an, comme un président de la Chambre, et dont la critique, complaisamment et durant trois colonnes de feuilleton, vante chaque semaine les talents variés, la voix géniale, le geste sublime » (« Le Comédien », Le Figaro, 26 octobre 1882). Aussi Coquelin a-t-il été au premier rang de ceux qui ont stigmatisé le pamphlet de Mirbeau contre la cabotinocratie : dans la publication en brochure de l’article du Figaro, Le Comédien, c’est sa réponse qui est reproduite tête-bêche. Un an plus tard, Mirbeau accusait « ce Scapin vantard, tapageur et brouillon » de s’être « introduit » dans une pièce de Daudet, oubliant que « le métier des Coquelins, c’est de jouer les pièces et non de les faire » : « Impuissants à créer, ils ne peuvent qu’obéir. Ils ne sont pas des artistes, ils ne sont que des agents subalternes de l’art » et ils ne « ne comptent pas plus que le lamentable bobèche, qui amuse les foules grossières, du haut de ses tréteaux de la foire de Neuilly » (« Coquelin Daudet et Cie »,  Les Grimaces, 8 décembre 1883). Voyant en Coquelin « notre grand Cabotin national », Mirbeau tourne volontiers en dérision son narcissisme extravagant (il le décrit entouré de milliers de bustes et de portraits...) et lui prête des propos d’une insondable prétention : « Je suis le centre, le pivot, l’âme même de la patrie » ; « j’incarne la France et la France m’incarne : nous sommes consubstantiels l’un à l’autre » ; « Je n'entreprends ce voyage [en Allemagne] que dans le but de faire rayonner ces nouvelles vérités sur le monde... »  (« Dies illa », Le Journal, 17 juin 1894). Dans Le Jardin des supplices (1899), Mirbeau trouvera encore le moyen de dauber sur Coquelin : à Ceylan, un faux savant, sir Oscar Terwick, montre à l’anonyme narrateur un de ses innombrables bustes et le considère comme un grand naturaliste, à l’instar de Darwin et Haeckel...

Cela n’empêchera pourtant pas Mirbeau, réconcilié tardivement avec les acteurs de la Comédie-Française, de se rallier au projet de maison de retraite pour les vieux comédiens dont Coquelin a pris courageusement l’initiative et de lancer, à sa demande, un grand appel à la générosité publique pour trouver les 100 000 francs qui manquent pour mener l’entreprise à son terme. À cette occasion, Mirbeau rend hommage à l’« activité inventive, obstinée, prodigieuse », de Coquelin, et à sa « foi héroïque qui déplace les montagnes » (« Pour les comédiens », Le Figaro, 20 avril 1903).

P. M.

 

 

 

 

 


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