Familles, amis et connaissances

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Terme
GIDE, andré

GIDE, André (1869-1951), écrivain né d’une mère normande et d’un père cévenol, professeur de droit à Paris, tous deux protestants, s’est très tôt voulu poète et s’est voué à la littérature, commençant à 17 ans à tenir un Journal qui l’accompagnera jusqu’à sa mort, et multipliant les écrits dans les genres les plus divers (poèmes, romans, récits, traités, soties, théâtre, écrits autobiographiques, essais, etc.), animé par une très haute idée de la littérature et de sa mission. C’est ainsi qu’il a toujours jugé que toute œuvre devait « manifester », que les critères esthétiques et éthiques, intrinsèquement liés, devaient l’emporter sur toute autre considération, et toute sa vie, il s’est montré exigeant avec lui-même comme avec les autres. Entré en littérature sous l’égide du Symbolisme, il s’en libère à partir de1895 avec Paludes  (1895), et, dans Les Nourritures terrestres (1897), il exprime son attente d’un bonheur terrestre, à l’écoute des voix de la nature. Avec Corydon (1911-1920-1924), il défend le caractère naturel de l’homosexualité et réclame sa reconnaissance ; Les Caves du Vatican (1914) est une sotie qui clôt, pense-t-il, toute sa phase d’œuvres ironiques ; Si le grain ne meurt (1924-1926), le récit autobiographique de sa jeunesse jusqu’à ses fiançailles, en 1895 ; Les Faux-Monnayeurs (1926), un roman qui renouvelle considérablement le genre, à la fois roman du roman et roman d’aventures. Il luttera ensuite contre les méfaits de la  colonisation, militera en faveur de la révolution soviétique, et obtiendra le prix Nobel de littérature en 1947.

         Dès 1890, il lit Le Calvaire de Mirbeau, qui l’intéresse, puis Sébastien Roch, envoie à leur auteur sa première œuvre, Les Cahiers d’André Walter (1891), et continuera à lui adresser ses œuvres dédicacées jusqu’aux Caves du Vatican. Mais bientôt, Gide se montre agacé par ses articles et ses polémiques, et en 1898, il écrira que ses articles « sont stupides » : « Certainement c’est parce qu’il a du génie ; mais c’est fâcheux qu’il n’ait pas plus de talent. » Puis : « S’il était plus vrai, M. Mirbeau serait moins brutal, et s’il était moins brutal, il ne serait plus rien du tout. » Plus tard, à propos des Vingt et un jours d’un neurasthénique, que « les monstres [lui] sont absolument indispensables », et il lui reproche de donner trop facilement dans l’outrance, la caricature et la polémique. Manifestement, chacun d’eux se fait une idée bien différente de la littérature : tandis que Mirbeau attaque la poésie et particulièrement Vielé-Griffin, et se lance dans des combats de toutes natures, Gide affirme la primauté de l’art.

         Cela n’empêche pas les deux hommes de manifester en faveur de Dreyfus, et Gide prend la défense de Mirbeau lorsqu’il est attaqué pour d’anciennes déclarations antisémites, proclamant le droit au changement. Plus tard, ils se rencontrent aussi dans leur admiration commune pour La Faim de Knut Hamsun.

         Le Jardin des supplices (1899), dont Gide n’a jamais parlé, contient pourtant un épisode manifestant de troublantes analogies avec le crime gratuit de Lafcadio, dans les Caves du Vatican, les deux meurtres étant commis sans raison dans un train, par « instinct vital », par des êtres en proie au sentiment de s’égaler à Dieu créateur par leur geste de folie, pensant aussi renouer par là avec l’homme primitif.

         En 1900-1901, les deux hommes se fréquentent lorsque Gide rallie La Revue blanche, dont Mirbeau est un pilier. Et en 1903, c’est Alice, la femme de Mirbeau, qui s’adresse à la femme de Gide pour lui proposer l’échange de leurs servantes. Puis, en 1908, Mirbeau fait de grandes déclarations d’amitié à Gide, qui a dit son admiration pour Les affaires sont les affaires, au moment de ses difficultés à faire jouer Le Foyer à la Comédie-Française (« De tous nos amis spirituels, vous êtes, mon cher Gide, le premier inscrit sur la liste de notre répétition générale »), et il lui envoie La 628-E8.

         Gide a assez souvent sollicité le concours du puissant journaliste en faveur de l’un ou l’autre de ses amis ou protégés : Ghéon, Charles-Louis Philippe, Michel Yell, Marguerite Audoux, Jacques Copeau, car il sait que c’est un homme influent, un homme de cœur, d’une « générosité foncière », dont l’œuvre abonde en traits de génie, même si elle est inégale et n’est pas celle d’un artiste. Tous deux différaient, mais ils ont su s’apprécier et se respecter.

A.G.

Bibliographie : Alain Goulet, « Octave Mirbeau devant André Gide », in Octave Mirbeau : passions et anathèmes, Caen, Presses de l’Université de Caen, « Colloque de Cerisy-la-Salle », 2007, pp. 151-170 ; Pierre Masson, .  « Gide et Mirbeau », Cahiers Octave Mirbeau, n° 4, mai 1997, pp. 386-399.


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