Familles, amis et connaissances

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Terme
NATANSON, misia

NATANSON, Misia (1872-1850). Fille du sculpteur polonais Cyprien Godebski, Misia passe son enfance dans un milieu artistique, rencontre Liszt chez son grand-père maternel (le violoncelliste Adrien-François Servais), côtoie Félicien Rops, est poussée vers une carrière de pianiste par Gabriel Fauré — carrière à laquelle elle renonce lorsqu’elle épouse Thadée Natanson en avril 1893 ; femme  libérée, dotée d’un instinct artistique exceptionnel, elle devient alors pour le groupe de la Revue Blanche une stimulatrice et un symbole. Vuillard, Bonnard et Roussel lui doivent leur émancipation du groupe des Nabis, mené jusqu’alors par Ranson, Sérusier et Denis. L’affiche de Toulouse-Lautrec qui la représente et les tableaux de Bonnard et de Vallotton manifestent son influence et la séduction qu’elle exerce alors sur beaucoup d’esprits, y compris Mallarmé — pour celui-ci, dont la muse était Méry Laurent, Misia et Thadée représentent la modernité de la jeunesse. Misia est une sorte de muse provocatrice, au sens où par son comportement, sa beauté, ses audaces calculées, elle stimule la création chez les artistes sans jamais intervenir directement dans le processus créateur. Pris par la direction éditoriale de la Revue Blanche, impliqué dans des causes humanitaires, sociales et politiques, engagé dans des projets industriels, Thadée n’est plus en mesure de mettre à sa disposition son temps et les moyens financiers correspondant à ses désirs lorsqu’en 1900, elle rencontre Alfred Edwards, homme d’affaires millionnaire, grand manipulateur, qu’elle épouse en 1903, au moment de la disparition de la Revue Blanche. Puis elle divorce une seconde fois et se marie avec le peintre catalan José-Maria Sert. Inspiratrice de Ravel, pressentant le destin de Serge Diaghilev, elle devient le mécène des Ballets russes, lance Chanel, se lie à Stravinsky, Picasso, Satie, Claudel, Proust, Cocteau, Renoir, Debussy, Morand et Radiguet. Ravel lui dédie plusieurs morceaux célèbres, qui sont encore un indicateur de cette stimulation créatrice.

Au moment de l’affaire Dreyfus, Mirbeau devient un ami intime de la famille Natanson, de Thadée surtout ; Misia faisait tourner bien des têtes, et il n’est pas improbable que Mirbeau ait eu un coup de cœur, ainsi qu’en témoigne Henri de Régnier. C’est par l’entremise de Mirbeau que Misia, à laquelle il désirait plaire, rencontre Alfred Edwards, son ancien patron au Matin, en juin 1900.

Dans son édition de la Correspondance (2009) de Mirbeau, Pierre Michel suppose que Misia pourrait être la dédicataire, désignée par les initiales M. N., des « Contes pour une malade », parus en feuilleton dans Le Journal en septembre 1900. Trois de ces contes se présentaient sous forme de lettres adressées à celle que Mirbeau appelle sa « chère petite amie ». Elles auraient constitué pour lui à la fois un moyen de faire sa cour et un procédé mettant en scène un double littéraire de la jeune femme ; elles sont aussi l’expression de la réaction que Misia savait susciter chez les artistes et les écrivains.

P.-H. B. et C. B.

 

Bibliographie : Paul-Henri Bourrelier, La Revue Blanche, une génération dans l’engagement 1890-1905, Paris, Fayard, 1907 ; Arthur Gold et Robert Fizdale, Misia : la vie de Misia Sert, Gallimard, “Folio”, 1984 ; Paul Morand, L’Allure de Chanel, Gallimard, “Folio”, 2009 ; Misia Sert, Misia, Paris, Gallimard, 1952.

 


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