Familles, amis et connaissances

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Terme
SARDOU, victorien

SARDOU, Victorien (1831-1908), prolifique auteur dramatique devenu immensément riche grâce à ses nombreux succès. Après des débuts difficiles, il a fait représenter un grand nombre de comédies, qui manquent de vis comica, et de drames « historiques » aux ficelles éprouvées et efficaces. Il a connu ses principaux triomphes avec Les Pattes de mouches (1860), La Famille Benoîton (1865), Patrie (1869), La Haine (1874), Divorçons (1880), Fédora (1882), Théodora (1884) , La Tosca (1888), mis en musique par Puccini, et Madame Sans-Gêne (1893). Thermidor (1891), qui met en cause Robespierre et la Terreur, a été un temps interdit, au nom de la défense de la Révolution qui constitue « un bloc », selon l’expression de Clemenceau. Il a aussi fait jouer des pièces à intentions morales et sociales : Séraphine (1869), Rabagas (1872), Dorah (1877), Daniel Rochat (1880), Spiritisme (1897). Il a été élu à l’Académie Française en 1877.

Sardou incarne une conception du théâtre qui n’avait, semble-t-il, guère de chances de plaire à Mirbeau, car il en voit tous les gros sabots, les invraisemblances psychologiques et les effets fabriqués, comme cela apparaît dès son compte rendu de Ferréol, le 23 novembre 1875. Reste que des pièces bien dialoguées et ficelées, avec un indubitable savoir-faire, peuvent plaire même à un public qui cherche au théâtre un peu plus qu’un simple divertissement, pour peu qu’on y trouve quelques personnages fortement charpentés qui donnent une impression de vie. Sans doute est-ce le cas de Mirbeau, quand il rédige le dithyrambique qu’il consacre à Théodora le 29 décembre 1884 dans Le Gaulois : il qualifie ce drame de « véritable et pur chef-d’œuvre », car le « génie » du dramaturge « sait nous faire respirer, en même temps que les plus délicieux parfums de l’art idéal, des odeurs effrayantes d’humanité » ; quant aux personnages, ils « vivent, avec leur cerveau, leur chair et leur âme. Ces compliments paraissent aujourd’hui quelque peu excessifs, mais le but de l’article étant de dénoncer les méfaits de la critique, responsable de « l’infériorité si constatée du théâtre », il est probable que l’outrance des compliments sert à mieux faire ressortir le danger de ces incompétents et ignorants notoires que sont les critiques dramatiques, incapables de « discerner un ouvrage remarquable ». Dans un article de la même époque, « L’Indiscrétion » (Le Gaulois, 5 décembre 1884), Mirbeau exprime son admiration pour la vie discrète et retirée de Sardou, qui ne compte que sur son talent pour se faire reconnaître, loin de la réclame dont abuse Alexandre Dumas fils (« L’Indiscrétion », Le Gaulois, 5 décembre 1884). Mais là encore, Mirbeau n’encense Sardou que pour mieux dégommer Dumas. Reste qu’un an plus tard il lui  dédie une de ses Lettres de ma chaumière, « Le Tripot aux champs », ce qui constitue un signe de considération. Par la suite son admiration a visiblement décliné et, en 1897, sous le masque de Jean Salt, il se moque du spiritisme commercial d’un dramaturge dépourvu d’âme, dans une fantaisie intitulée « Spirisardonisme ».

Sardou a eu le mérite d’être dreyfusard, dans une Académie massivement anti-dreyfusarde. Au cours de la bataille du Foyer, en 1908, consulté par le ministre de l’Instruction Publique, il a pris parti pour Mirbeau et Thadée Natanson contre Jules Claretie et la Comédie-Française au nom du respect du contrat passé entre le théâtre et les auteurs.

P. M.


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