DANS LA VIEILLE RUE (1885)

 
     
 

Paru sous le pseudonyme de Forsan, Dans la vieille rue est de nouveau le récit émouvant du sacrifice d’une " vierge à vendre ", comme l’étaient déjà Julia Forsell (for sale) de L’Écuyère et Chantal de Varèse de La Maréchale. De fait, le patriarcat, vieux de quelques millénaires d’oppression du deuxième sexe, s’est adapté sans mal au règne de la bourgeoisie et au culte de l’argent, et les femmes continuent de n’être qu'un cheptel à la disposition des mâles et soumis à l’inflexible loi de l’offre et de la demande.

"Vielle rue de Hyères, où est situé le roman"

Comme dans les romans signés Bauquenne, Mirbeau-Forsan a mis au point une " machine infernale ", où se combinent les " engrenages " des passions et des instincts, d’un côté, et les " fatalités " du milieu social, de l’autre : " mélange de forces intérieures et d'impulsions extérieures qui dirigent notre destinée et que nous ne saurions ni définir, ni déterminer ". Il s’agit donc de nouveau d’un roman en forme de tragédie, où l’innocente Geneviève Mahoul est hors d’état de faire face à un affrontement de forces contradictoires qui la dépassent : la Nature et la Culture, les instincts du corps et le refoulement imposé par des siècles de christianisme. Comme l’écuyère du roman homonyme, elle ne peut qu’être broyée entre les mâchoires d’insoutenables dilemmes, et son triste destin sera rendu encore plus pathétique par " l’ironie de la vie ", expression de celle du romancier qui tire les ficelles et joue avec la naïve Geneviève comme le chat avec la souris.

Sans jamais céder pour autant à la tentation du roman à thèse, Mirbeau s’emploie de nouveau à mettre en lumière les mortifères illusions de l’amour, les conséquences désastreuses du mariage monogamique et les effets dévastateurs de l’imprégnation religieuse. Comme dans Sébastien Roch, autre roman ironique, sa pitié douloureuse pour sa misérable héroïne ne peut qu’inciter le lecteur à se poser des questions et à remettre en cause l’ordre social.

Pierre MICHEL

Préface

Une édition critique de Dans la vieille rue a été réalisée par Pierre Michel, et figure en annexe du tome II de l’Œuvre romanesque de Mirbeau, Buchet/Chastel / Société Octave Mirbeau, 2001.

Le texte du roman est accessible sur le site Internet des éditions du Boucher, avec une nouvelle préface de Pierre Michel.
 

 
 

Romans

 
 

L'Ecuyère, La Maréchale, La Belle Madame le Vassart, La Duchesse Ghislaine, Le Calvaire, L'Abbé Jules, Sébastien Roch, Dans le Ciel, Le Jardin des supplices, Le Journal d'une femme de chambre, Les 21 jours d'un neurasthénique, La 628-E8, Dingo, Un Gentilhomme

 
 
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